Membre émérite de la Ligue d’action nationale
Le grand sociologue Fernand Dumont disait, avec raison : on n’invente pas un peuple, on n’improvise pas une nation. Il a rappelé souvent et avec insistance que depuis deux siècles et demi, nous nous sommes définis comme Canadiens français. Il n’acceptait pas que surgisse soudain une « nation québécoise ».
Dans ma famille, comme chez les autres de notre origine, on se disait spontanément « Canadiens français », sans orgueil, mais avec fierté. Et il en allait ainsi chez tous les nôtres, à travers tout le pays, au Québec comme dans le reste du Canada français. Il y avait l’histoire commune et à travers elle l’héritage commun, culturel, politique et religieux. Et notre peuple savait intégrer puis assimiler naturellement les nouveaux venus de diverses origines, ceux-ci y ressentant un peuple simple, mais fier et courageux. Dans notre quartier, le secteur de Montréal que l’on appelle aujourd’hui « Petite-Patrie », tout le monde se ressentait et se disait naturellement Canadien français. Certains de mes soeurs et frères côtoyaient à l’école, primaire puis secondaire, des enfants et adolescents de diverses origines (italienne et grecque notamment) qui, au bout de quelques années, s’estimaient et se disaient Canadiens français.
Il y avait, il y a toujours une authentique nation canadienne-française, comptant, selon les familles, de cinq ou six à huit ou neuf générations, Canadiens français et catholiques (cela allait de pair). Il aura fallu attendre notre discutable « Révolution tranquille » – qui a charrié le meilleur et le pire – pour voir apparaître une prétendue nation québécoise.
Pour ma part, je reste et me proclame Canadien français comme les miens depuis la Conquête, quitte à ajouter ou à préciser, le cas échéant : du Québec. Mes ancêtres furent Canadiens français, mes contemporains le sont comme le sont ou le seront mes descendants. Notre grand sociologue avait raison : on n’invente pas un peuple, on n’improvise pas une nation.