Tripler la population du Canada d’ici l’an 2100
Le meilleur moyen de résoudre l’opposition des deux groupes français et anglais [au Canada], c’est de noyer la population française sous le flot continu d’une immigration organisée méthodiquement, contrôlée au départ, accueillie à l’arrivée, assurée d’une situation privilégiée dans la colonie.
Lord Durham (John Lambton, 1792-1840) (dans Report on the Affairs of British North America, 31 janvier 1839)
Un peuple qui n’est pas maître de son destin doit limiter le recrutement d’immigrants à sa capacité d’intégration. C’est à cette condition que la diversité culturelle peut être enrichissante. Autrement, nos racines et notre identité sont en danger.
Rosaire Morin (1923-1999), journaliste et administrateur, 1966
Avant l’arrivée au pouvoir du Parti libéral du Canada (PLC), dirigé par le premier ministre Justin Trudeau, en 2015, le Canada accueillait, bon an mal an, environ 250 000 immigrants par année ou un million de personnes tous les quatre ans, et cela entre 1990 et 2015. [N. B. : En 2021, le Canada ne comptait que cinq villes de plus d’un million d’habitants, soit Toronto, Montréal, Calgary, Ottawa et Edmonton.]
Or, le 14 février 2022, le gouvernement libéral minoritaire en poste à Ottawa a dévoilé son plan1 d’accueillir 1,33 million d’immigrants, au cours des trois prochaines années. Si on y ajoute le nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile, celui des travailleurs temporaires, des étudiants étrangers2 et des visiteurs qui allongent indéfiniment leur présence en territoire canadien, ce nombre devrait facilement dépasser 1,5 million de personnes, soit se rapprocher de la population entière de la ville de Montréal (1,8 million d’h.), à chaque période de trois ans, avec un effet multiplicateur qui ira en s’accroissant.
À ce rythme migratoire extrême, un des plus élevés au monde, le Canada ne sera plus reconnaissable, démographiquement parlant, en moins d’une génération. Une politique majeure de remplacement de population aura été accomplie, presque en catimini, sans débats publics, sans consultation générale et sans avoir fait des études approfondies sur les conséquences probables d’un tel projet.
La population canadienne devrait être informée des motifs et des objectifs politiques et économiques qui sont derrière une telle politique d’enflure démographique. Dans une véritable démocratie3 « du peuple, par le peuple et pour le peuple », en effet, l’adoption d’une politique structurelle à très long terme devrait faire l’objet d’un référendum populaire, ou à tout le moins, devrait être soumise au peuple souverain à l’occasion d’une élection portant sur ce thème principal.
Or, la question d’une immigration ultra massive pour les prochaines décennies n’a reçu aucune attention de la part des partis politiques et des médias, au cours de la dernière élection fédérale4.
Rappelons que lors de cette élection générale, le parti libéral du Canada (PLC) obtint 32,6 pour cent des suffrages. De plus, comme le taux de participation à cette élection ne fut que de 62,9 pour cent, l’appui populaire direct que le PLC a reçu de l’ensemble des électeurs canadiens ne fut que de 20,3 pour cent.
Dans les circonstances, il est difficile de conclure que le gouvernement minoritaire libéral actuel jouit d’un mandat clair et légitime de la population canadienne pour changer substantiellement la composition démographique du Canada, au cours des décennies à venir, comme ce serait le cas avec la mise en place d’une politique d’immigration massive sur le long terme.
D’autre part, il est peu connu qu’une proposition de tripler la population du Canada, d’ici l’an 2100, vient d’un obscur organisme politique à but non lucratif, fondé en 2011 par un petit groupe de pression d’hommes d’affaires et de journalistes de Toronto et qui porte le nom de Century Initiative5 (Initiative du Siècle).
Dans le passé, quand le gouvernement fédéral voulut mettre de l’avant une politique structurelle d’importance, comme ce fut le cas6 pour le projet de libre-échange commercial avec les États-Unis, il mit sur pied une commission royale d’enquête pour en mesurer toutes les conséquences. C’était « La Commission royale sur l’union économique et les perspectives de développement du Canada », également connue sous le nom de commission Macdonald.
De plus, le peuple fut directement consulté sur la question, car l’élection fédérale de 1988 porta essentiellement sur un seul enjeu : la signature d’un accord de libre-échange avec les États-Unis, oui ou non. C’est comme cela qu’un gouvernement démocratique responsable procède. Autrement, il faut parler d’un gouvernement oligarchique et autocratique.
La proposition du groupe de pression torontois Century Initiative
Le projet du groupe torontois Century Initiative , est que le Canada – lequel comptait 37 millions d’habitants au dernier recensement de 2021 et qui normalement, selon les projections officielles, devrait en compter 53 millions en l’an 2100 (selon une progression démographique naturelle et une politique d’immigration moyenne) – pourrait compter en l’an 2100, non pas 53 millions d’habitants comme prévu, mais bien 100 millions d’habitants, pourvu que le gouvernement fédéral canadien adopte une politique d’immigration très agressive
À titre d’exemple, selon le plan de l’organisme de Toronto, le Canada compterait, dans à peine 78 ans, plusieurs méga-agglomérations urbaines de plus de dix millions d’habitants, un peu comme la Chine d’aujourd’hui. Ainsi, il y est prévu que celle du Toronto métropolitain passerait de 8,8 à 33,5 millions d’habitants ; celle du Montréal métropolitain gonflerait de 4,4 à 12,2 millions d’habitants ; celle du Vancouver métropolitain grandirait de 3,3 à 11,9 millions d’habitants, etc. Plusieurs méga-agglomérations canadiennes auraient chacune, autant de population que celle de plusieurs pays indépendants de taille moyenne.
Dans un tel scénario, il est à craindre que l’équilibre politique interrégional au Canada ait de fortes chances d’être rompu avec une province en particulier, l’Ontario, laquelle en viendrait, en l’an 2100, à compter à elle seule la moitié de la population canadienne. Il en irait de même de l’équilibre linguistique officiel anglais-français au Canada, lequel serait rompu en faveur d’une prédominance accrue de la langue anglaise.
Conséquences et faiblesses du projet de Century Initiative
Il est à prévoir que de nombreuses conséquences découleraient de la mise en œuvre du projet démographique du groupe de pression Century Initiative. En effet, il s’en suivrait de sérieuses conséquences tant économiques, politiques, sociales, culturelles, linguistiques, géographiques qu’environnementales, pour le Canada.
La première faiblesse d’un pareil plan vient que sa divulgation ne s’est point fait avec le dépôt d’études et d’analyses approfondies pour en appuyer le bien-fondé, notamment en ce qui concerne l’impact global qu’un tel projet aurait sur le niveau de vie et sur la qualité de vie des citoyens et citoyennes du Canada.
La deuxième faiblesse vient du fait qu’il n’a guère donné lieu à d’importants débats publics et qu’il n’a pas été suivi de consultations avec les gouvernements provinciaux, notamment avec le gouvernement du Québec, lequel possède des responsabilités et prérogatives historiques en matière d’immigration.
Le lobby du Century Initiative et le « Comité consultatif en matière de croissance économique » de 2016
Selon un des co-fondateurs du lobby Century Initiative, l’homme d’affaires torontois Dominic Barton (1962 – ), président de la firme de consultants McKinsey & Co – un Britannique né en Ouganda, et nommé par le premier ministre J. Trudeau ambassadeur du Canada en Chine, en 2019 – une croissance démographique rapide du Canada le positionnerait parmi les 45 pays les plus peuplés de la planète, en l’an 2100.
Ce statut de « gros » pays permettrait alors au gouvernement canadien de jouer un rôle accru sur la scène internationale. Selon cette vision des choses, l’influence internationale du Canada augmenterait considérablement avec une plus forte population, en plus de favoriser la croissance économique brute dans l’avenir. N. B. Le 23 octobre 2016, M. Barton donna une entrevue à la chaîne Global News au cours de laquelle il déclara :
C’est un gros chiffre [100 millions] – pour moi, c’est plus qu’un chiffre ambitieux »… « Cela changerait évidemment considérablement le pays. C’est une vision différente… Mais je ne pense pas que ce soit de la folie (but I don’t think it’s crazy!) »
On devrait savoir que tripler la population d’un pays avec des gens de cultures différentes serait susceptible de causer bien plus qu’un choc démographique. Car, en plus de chambarder profondément le Canada au plan de sa population, il est permis d’entrevoir qu’un tel projet provoquerait de multiples conséquences sociales, culturelles et linguistiques (congestion, pollution, surcharge des services publics et des installations de transport et déséconomies d’échelle, ghettoïsation, conflits linguistiques, criminalité, insécurité, etc.).
Et, fait non négligeable, considérant que le système de santé est déjà fortement surchargé et dégradé, c’est tout le système social canadien qui pourrait s’écrouler avec une croissance ultra rapide de la population. Face à des demandes exacerbées artificiellement, il faudrait évaluer quels seraient les niveaux d’imposition qui seraient nécessaires pour assurer le maintien de la qualité des programmes de santé et d’éducation au Canada.
En d’autres termes, le rêve démographique grandiose des promoteurs du Century Initiative pourrait tout aussi bien tourner au cauchemar pour les générations futures. En fait, il pourrait mettre en marche un processus de transformation sociale d’appauvrissement ou de tiers-mondialisation du Canada6, avec toutes les conséquences que cela représenterait.
Un fait aussi significatif à rapporter : M. Barton présida un comité fédéral consultatif de 14 membres sur la croissance économique, comité restreint que le gouvernement de J. Trudeau mit sur pied, le 18 mars 2016. [N. B. : Dans mon livre, publié chez Fides en 2018, La régression tranquille du Québec, 1980-2018, je précise (note 263, p. 305) que cet important comité ne comptait aucun québécois francophone en son sein, sauf une vice-rectrice de l’Université McGill portant un nom à consonance francophone.]
Ce comité recommanda7 que le gouvernement fédéral accroisse les niveaux d’immigration permanente à 450 000 personnes à partir de l’année 2021, soit un accroissement de 50 pour cent par rapport aux niveaux atteints de 300 000 immigrants, en 2016, et qu’il hausse graduellement ces niveaux à plus d’un 1 000 000 d’immigrants permanents par année, jusqu’en l’an 2100.
Les principaux arguments du Century Initiative pour tripler la population canadienne
Les deux principaux arguments invoqués par Century Initiative pour tripler la population canadienne en moins d’un siècle sont :
1– accroître l’importance politique du Canada sur la scène internationale ; et,
2– augmenter le taux de croissance économique brut du Canada en augmentant le nombre de consommateurs et de travailleurs nationaux grâce à l’immigration.
Bref, la « grosseur pour la grosseur » peut-elle être une raison valable pour transformer de fond en comble l’image démographique du Canada ? En effet, de tels arguments reposent essentiellement sur l’idée que le niveau du produit intérieur brut (PIB) devrait être au centre des préoccupations des décideurs de politiques publiques. Qu’en est-il de la qualité et du niveau de vie de la population ?
À moins de vouloir devenir un empire fortement militarisé, le Canada joue déjà un rôle relativement important au plan international. Cependant, au cours des années, ce rôle s’est quelque peu rétréci par rapport à ce qu’il était du temps du premier ministre Lester B. Pearson (1897-1972), prix Nobel de la Paix en 1957. Les causes de ce déclin ne sont nullement dues au manque de poids démographique du Canada, mais plutôt au fait que les politiciens canadiens qui ont succédé à Lester B. Pearson n’ont pas été à la hauteur. Il y a plusieurs pays très peuplés dans le monde, mais ce sont souvent des pays relativement pauvres et leur masse démographique ne leur procure guère une place enviable sur la scène internationale.
Le deuxième argument (niveau du PIB plutôt que niveau de vie) est un argument de gens d’affaires et non pas celui d’économistes. En effet, depuis 1989, le Canada est en situation de libre-échange commercial avec les États-Unis8.
Les producteurs canadiens ne sont nullement limités au seul marché canadien pour écouler leurs produits. Ils sont en mesure d’atteindre des niveaux de production qui génèrent des économies d’échelle en exportant une partie de leur production sur le marché américain. C’est ce que font déjà de nombreuses entreprises canadiennes. En contrepartie, les consommateurs canadiens ont accès à des importations en provenance des États-Unis, ce qui accroît la diversité des approvisionnements et ce qui stabilise les prix.
Les niveaux de vie dans le monde ne sont pas liés à la taille démographique des pays
En effet, les niveaux de vie (PIB par hab.) dans le monde sont très peu reliés à la taille démographique des pays. Cela semble plutôt être le contraire. C’est ce que montrent les travaux du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
Ainsi, le PNUD publie fréquemment un indice mondial de classement des pays en fonction du niveau de vie et de la qualité de vie de leurs habitants, l’Indice de développement humain (IDH)9. Cet indice montre le niveau de développement qualitatif (espérance de vie, instruction, niveau de vie) d’un pays, en tenant compte du potentiel économique.
Sauf exception, ce sont immanquablement les pays de petite taille ou de taille moyenne qui occupent les premiers rangs, en ce qui concerne les niveaux de vie et la qualité de vie des habitants, et non pas les pays les plus peuplés. Il existe, dans la plupart des cas, une relation négative entre la grande taille démographique de certains pays et le niveau de vie de leur population.
En 2019, à titre d’exemple, les trois pays en tête de liste pour le niveau de vie et la qualité de vie étaient tous les trois des pays de moins de 10 millions d’habitants : La Norvège (5,3 millions d’h.), l’Irlande (5,0 millions d’h.) et la Suisse (8,5 millions d’h.).
Certains souhaiteraient peut-être que le Canada devienne une copie conforme des États-Unis, en vue d’une éventuelle fusion entre les deux pays dans l’avenir. Cependant, est-on vraiment persuadé que le climat social qui prévaut aux États-Unis soit une chose digne d’émulation et qu’il soit à l’avantage des Canadiens de l’importer ?
Le vieillissement de la population et la pénurie de main-d’œuvre
Deux autres arguments invoqués par le groupe de pression du Century Initiative en faveur d’une immigration super massive : le premier serait de pallier le vieillissement de la population (provoqué par la baisse du taux de fécondité et par l’augmentation de l’espérance de vie) ; le deuxième viserait à prévenir une éventuelle pénurie de main-d’œuvre causée par le départ à la retraite des « baby-boomers », soit la cohorte de population née entre 1947 et 1966 au Canada.
Il est vrai que ces deux phénomènes nécessiteront des ajustements et des politiques d’appoint à court et à moyen terme, c’est-à-dire jusqu’en l’an 2050 approximativement, soit quand la cohorte des « baby-boomers » aura en grande partie disparu, mais non pas nécessairement à très long terme, sur la base de tout un siècle.
Par exemple, il appert que l’immigration en tant que telle ne modifie pas substantiellement la structure des âges d’une population, essentiellement parce que la majorité des immigrants arrivent au pays à l’âge adulte et que le programme de réunification des familles fait en sorte de faire venir des personnes immigrantes déjà âgées. À ce sujet, les travaux démographiques de Benoît Dubreuil et de Guillaume Marois montrent que l’apport de l’immigration sur une haute échelle n’est pas une panacée pour rajeunir une population qu’elle peut parfois accentuer son problème de vieillissement10.
Les moyens de pallier le phénomène du vieillissement de la population d’ici l’an 2050
D’autres pays industrialisés sont confrontés au même problème d’un choc démographique, et ils recourent à d’autres moyens que de compter sur une immigration internationale massive pour y faire face.
Par exemple, le Japon est un pays prospère avec une population encore plus vieillissante que celle du Canada, mais il ne s’en remet pas à l’immigration internationale pour faire face au phénomène. En effet, un pays peut plutôt mettre de l’avant des politiques natalistes, avec des mesures visant à hausser le taux de fécondité et à encourager les naissances ; d’autres politiques pour retarder l’âge de la retraite, compte tenu d’une espérance de vie allongée, peuvent être mises de l’avant ; il en va de même de mesures pour faire en sorte de faciliter et d’accroître le rôle des femmes sur le marché du travail ; de même, comme plusieurs entreprises le font déjà, il est possible de recourir davantage à la robotique pour effectuer plusieurs tâches intensives en main-d’œuvre ; et, en dernière analyse, un pays peut faire venir des travailleurs étrangers temporaires, en fonction de ses besoins économiques réels.
Concernant la pénurie de main-d’œuvre, il est important de bien situer cette question dans son contexte économique global.
En théorie, si une industrie en particulier a un besoin de travailleurs spécialisés, une immigration ciblée de tels travailleurs peut y remédier. Cependant, si on parle d’une pénurie généralisée à l’ensemble de l’économie que des variations dans les salaires et les programmes de formation ne peuvent combler, c’est une tout autre affaire. En effet, si le taux de croissance démographique ralentit d’une façon naturelle, les besoins de consommation vont aussi ralentir. Il en ira de même de certaines industries qui doivent s’adapter à une demande fluctuante ou en concurrence avec l’importation.
Il y a danger alors de solutionner le problème d’une pénurie de main-d’œuvre dans une industrie en particulier, mais en créant simultanément des pénuries de main-d’œuvre dans d’autres industries, notamment dans les secteurs de l’éducation et de la santé, du logement, de l’infrastructure routière et des services privés et publics en général, etc. L’économie peut alors faire face à une spirale sans fin de besoins de main-d’œuvre créés de toute pièce, gonflés par une population qui croît trop rapidement artificiellement, par l’immigration.
L’impact politique, linguistique et culturel sur les Canadiens français et sur le Québec français
À ma connaissance, le groupe de « Initiative du siècle » n’a fourni aucune réflexion sur les conséquences de son projet migratoire extrême sur les Canadiens français en générale, et sur la seule majorité politique qu’ils occupent au Québec. Si le gouvernement canadien allait poursuivre sur la voie d’un « Canada de 100 millions d’habitants » en faisant appel à une immigration ultra massive, la place des Canadiens français au Canada ne pourrait que chuter dramatiquement au cours des décennies à venir.
Au cours du XXe siècle, en effet, la politique d’immigration canadienne s’est traduite par une baisse continue du poids démographique et politique de la population de langue française au Canada. Ainsi, en 1941, 29,3 pour cent de la population du Canada était de langue maternelle française. Cependant, en 2016, ce pourcentage était tombé à 21,0 pour cent, une baisse de plus de huit points de pourcentage, en 75 ans. Avec la mise en œuvre du projet du groupe Century Initiative, il est possible d’entrevoir une chute au moins aussi importante, au cours des 75 prochaines années. Il s’en suivrait une situation qui menacerait la viabilité même et la pérennité de la langue française au Canada, au prochain siècle.
En ce qui concerne le Québec, la province fondatrice du Canada, son poids démographique dans l’ensemble du Canada pourrait tomber en bas de 10 pour cent à la fin du siècle. Au Québec même, les francophones pourraient se retrouver en minorité sur le territoire de leurs ancêtres, pour la première fois en 500 ans.
Si le gouvernement fédéral de J. Trudeau fait sien le projet de Century Initiative, cela fera de facto en sorte, par une politique migratoire extrême, de louisianiser le Québec et de marginaliser les Canadiens français.
Conclusion
Quand tout est pris en considération, et surtout si le gouvernement fédéral canadien continue de s’inspirer du projet du lobby Century Initiative pour élaborer sa politique d’immigration, c’est à un véritable tsunami migratoire programmé auquel la population canadienne devra faire face au cours des prochaines années.
Dans une véritable démocratie, l’adoption d’une telle politique gouvernementale à long terme devrait être soumise au peuple pour approbation. Or, ni la proposition du « Canada 100 millions » d’habitants du lobby Century Initiative, ni la politique d’immigration massive qui s’en inspire, n’ont fait l’objet de débats publics. Ces mesures n’ont pas été soumises à la population, soit à l’occasion d’un référendum, soit lors d’une élection générale. Il s’agit d’une entorse majeure au principe démocratique.
1 Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Un nouveau plan en matière d’immigration, Ottawa, 14 février 2022.
2 Immigration Canada, Le Canada bat un record historique en accueillant 450 000 étudiants étrangers en 2021, 25 mars 2022.
3 Rodrigue Tremblay, « Le Canada est-il une démocratie ? », Vigile, 21 décembre 2021.
4 Les principaux enjeux débattus furent : la pandémie ; les armes d’assaut ; les garderies et le réchauffement climatique.
5 Andy Blatchford, “Influential Liberal advisers want Canadian population to triple by 2100”, Global News, October 23, 2016.
6 Bernard Conte, Tiers-Mondialisation de la planète, 2013, 284 p.
7 Campbell Clark, “Big Canada concept has some major drawbacks“, The Globe and Mail, 30 octobre 2016.
8 L’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis d’Amérique (ALÉ), fut paraphé en 1988 et il est entré en vigueur le 1er janvier 1989. Il crée une zone de libre-échange entre les États-Unis et le Canada. Il a été complété en 1994 et en 2020 par l’Accord Canada-États-Unis-Mexique.
9 Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Rapport sur le développement humain, Classement des États du monde par l’indice de développement humain, le 1er septembre 2020.
10 Benoît Dubreuil et Guillaume Marois, Le Remède imaginaire. Pourquoi l’immigration ne sauvera pas le Québec, 2011, 320 p.
* Professeur émérite de sciences économiques à l’Université de Montréal et ancien ministre de l’Industrie et du Commerce québécois.