Prix André-Laurendeau 2018 – allocution de René Ricard

« La péréquation ? Un marché de dupes ! » que s’intitule mon texte paru dans le numéro de mai 2018 de la revue. Laissez-moi vous en parler, un p’tit cinq minutes.

Bonsoir !

C’est avec un grand plaisir et une bonne dose d’humilité que je reçois le prix André-Laurendeau, eu égard à mes colistiers, Madame Labelle et Messieurs Lemieux et Comeau, que je salue chaleureusement.

Merci à la Ligue d’action nationale, ainsi qu’aux membres du jury qui ont honoré de leur choix mon article.

« La péréquation ? Un marché de dupes ! » que s’intitule mon texte paru dans le numéro de mai 2018 de la revue. Laissez-moi vous en parler, un p’tit cinq minutes.

D’abord, initialement, j’ai hésité avec un autre titre pour l’article. Ç’aurait été « La péréquation ? Un bijou de propagande canadienne ». Mais cela m’a semblé beaucoup trop flatteur pour le pays d’à côté, dont les complices infiltrés à tous les niveaux de nos médias ne manquent pas une occasion de discréditer le Québec pour nous saper le moral. Le but de toute propagande est en effet de contrôler l’opinion publique. Et au Québec, il s’agit essentiellement pour les fédéraux de faire en sorte qu’il soit instillé dans cette opinion la certitude que nous ne possédons pas les moyens de notre liberté.

Ça peut paraître banal tellement c’est habituel, mais la propagande dénigrante contre le Québec est constamment présente dans les médias canadiens et québécois. L’arme de prédilection de cette propagande est la désinformation. Celle-ci peut prendre plusieurs formes. Ça peut être nier des faits, inverser des faits, mélanger le faux et le vrai, modifier des circonstances, estomper, camoufler, généraliser.

Dans le cas de la péréquation, nos détracteurs prennent bien soin d’estomper le contexte du programme de soutien fédéral dans son ensemble, comme établi par le gouvernement du Canada. Ils prennent soin de traiter la péréquation hors de ce contexte, pouvant ainsi facilement la diaboliser, puis généraliser au mépris de tous les Québécois. On a ici quatre techniques de désinformation qui sont associées : estomper, décontextualiser, diaboliser, généraliser.

Dans les faits, la péréquation ne constitue que le quart des sommes totales versées aux provinces et aux territoires dans le cadre du programme de soutien fédéral. On fait bien attention chez nos détracteurs de ne pas parler des trois autres quarts du programme, ou en tout cas de ne pas les associer à la péréquation. Il s’agit des transferts canadiens en santé, des transferts canadiens en programmes sociaux et de la formule de financement des territoires. Or, lorsque l’on compare le total des sommes reçues par le Québec en soutien fédéral, ce qui inclut la péréquation, avec le cumulatif des sommes reçues par une population équivalente du ROC, le reste du Canada, on constate que le Québec reçoit tout compte fait ce que reçoit cette population équivalente du ROC. Cela n’a plus rien à voir avec les 66 % de la péréquation totale qui est versée au Québec. On découvre l’ampleur de la désinformation.

Il y a là tout un paradigme à déconstruire dans la population !

En résumé, traiter la question de la péréquation, comme le ROC et ses acolytes le font, hors du contexte global du programme de soutien fédéral, est intellectuellement malhonnête et ne constitue que la pointe de l’iceberg des duperies canadiennes.

Qui lit L’Action nationale sait que ces duperies sont nombreuses. Laissez-moi quand même vous en mentionner une avant de terminer, qui est tellement banale, elle aussi.

On a tous, à l’occasion, lu ou entendu certains journalistes dire que le Québec recevait plus d’argent, de biens et de services d’Ottawa que ce qu’il envoyait à Ottawa. Ce que l’on évite de nous expliquer toutefois, parce que la stigmatisation du Québec en serait beaucoup moins efficace, c’est que lorsque le Québec semble recevoir plus que ce qu’il a envoyé, tous les territoires et toutes les provinces, sauf exception, reçoivent aussi plus que ce qu’elles ont envoyé. Mais ça, on fait bien attention de ne pas le dire. Et par quel miracle Ottawa peut-il retourner plus que ce qu’il reçoit ? C’est simple… en faisant des déficits, c’est-à-dire en empruntant : cent milliards de dette nette fédérale supplémentaire sous le règne du précédent gouvernement Trudeau. En fait, c’est de la dette qui est ainsi transférée au Québec, puisqu’on ne manque pas de nous faire savoir qu’advenant notre indépendance nous devrons assumer notre part de cette dette que nous n’avons pas contractée, qui nous est transmise à notre corps défendant et souvent contre les intérêts stratégiques mêmes du Québec.

Ah ! et puis, une autre dernière duperie, qui va, celle-là, au-delà de la question de la péréquation et qui constitue depuis 160 ans une formidable iniquité. L’éléphant dans la pièce ! Ottawa, la capitale fédérale du Canada qui est située en Ontario, c’est-à-dire sur le territoire d’une des provinces fédérées, au détriment des autres provinces et surtout du Québec, malgré quelques concessions. Partout dans le monde, dans un souci d’équité et afin de ne favoriser aucun État en particulier au détriment des autres, les fédérations qui se respectent établissent leur capitale fédérale sur un territoire qui est une ville-État ou un district fédéral indépendant, qui ne privilégie, ni ne rapporte, ni ne se rapporte à aucun des États en particulier au détriment des autres États fédérés. Il n’est pas nécessaire d’aller bien loin. Depuis 1791, Washington, D.C., District of Columbia, la capitale fédérale des États-Unis, occupe un territoire indépendant entre le Maryland et la Virginie. Il en est de même pour Berlin, Brasilia, Bruxelles, Buenos Aires, Canberra, Mexico, Vienne, et les autres. L’exception dans le monde… c’est Ottawa. Ottawa est située sur le territoire de l’Ontario, essentiellement au bénéfice de l’Ontario ! Et ces bénéfices sont gigantesques. Des retombées économiques de dizaines de milliards de dollars chaque année dont le Québec est privé.

Voilà ! C’était de ces sujets que j’ai abordés dans mon article de mai 2018.

Je termine en vous faisant part à nouveau de ma gratitude, et en vous laissant sur une réflexion qui vous paraîtra peut-être contre-intuitive : ne faudrait-il pas cesser d’avoir honte de la péréquation que nous recevons ? Ne faudrait-il pas cesser de nous faire les complices de nos détracteurs ? Les versements de péréquation que le Québec reçoit d’Ottawa sont des retours sans condition d’une fraction seulement des droits, des impôts et des taxes que nous envoyons au fédéral. Sans condition, cela veut dire que le Québec peut disposer de ces sommes à son entière discrétion… ce qui n’est pas le cas des autres transferts canadiens, pour lesquels il arrive souvent que le Québec subisse même du chantage.

Vous le savez ! Il y a belle lurette que nous nous faisons avoir dans ce pays. Si vous deviez lire mon article, je vous garantis que vous n’auriez plus honte de la péréquation que le Québec reçoit et je suis persuadé que vous seriez d’avis avec moi que d’ici à notre indépendance, il nous faut au contraire aller chercher le plus de péréquation possible !

Merci.

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