Prix Richard-Arès 2011 – Le remède imaginaire

L’ouvrage de Benoit Dubreuil et de Guillaume Marois qui a pour titre: Le remède imaginaire. Pourquoi l’immigration ne sauvera pas le Québec publié chez Boréal s’est mérité le prix Richard- Arès ex aequo.

remedeimaginaire190L’ouvrage de Benoit Dubreuil et de Guillaume Marois qui a pour titre: Le remède imaginaire. Pourquoi l’immigration ne sauvera pas le Québec publié chez Boréal s’est mérité le prix Richard- Arès ex aequo.

Il est apparu important au jury de souligner par cette marque de reconnaissance que constitue le prix Richard-Arès cet ouvrage qui porte sur la question de la politique d’immigration et d’intégration qui soulève des enjeux importants.

Au moment où notre société vieillit et qu’on craint une pénurie de main-d’œuvre, il semble aller de soi qu’il faille augmenter les niveaux d’immigration. Comme ces questions doivent se retrouver au cœur d’un débat public, il nous est apparu utile que ces deux auteurs interviennent par cet ouvrage solide pour corriger les idées fausses que le public et les décideurs entretiennent de l’effet de l’immigration sur l’économie et la démographie. Ces idées fausses disent les auteurs, empêchent d’évaluer de façon objective la politique québécoise d’immigration et conduisent aussi bien les Québécois de naissance que les immigrants à concevoir des attentes démesurées à l’égard de cette politique.

Ce livre a suscité un intérêt certain dans les médias et dans le monde politique car il attaque de front un sujet tabou. Il s’attaque au consensus très fort parmi nos intellectuels et nos dirigeants politiques qui attribuent à l’immigration des bienfaits qui ne sont pas fondés. Les auteurs démontrent, preuves scientifiques à l’appui, que l’immigration ne peut résoudre le problème du vieillissement de la population; de même pour le problème de la pénurie de main-d’œuvre appréhendée. On peut appuyer des politiques favorables à l’immigration pour d’autres raisons, disent les auteurs.

Benoit Dubreuil qui est philosophe et Guillaume Marois qui est démographe ont analysé les études les plus poussées sur ces questions et concluent de façon péremptoire que le seul facteur qui peut avoir un impact réel sur la structure d’âge, c’est la fécondité. Reconnaitre ce fait ne va pas de soi. Ceux qui reconnaissent ce fait ne seraient-ils pas des partisans d’une politique nataliste? Ce qui n’est pas au goût du jour. Les auteurs du livre démontrent, preuves à l’appui, s’appuyant sur plusieurs travaux scientifiques qu’il n’y a pas de lien entre les flux migratoires et l’élévation de la prospérité ou entre l’immigration et le renouvellement de la main d’œuvre. Ils abordent toute la question de l’intégration des immigrants critiquant ceux qui s’imaginent qu’il est possible de concilier les objectifs d’intégration économique et les volontés d’attirer d’amples contingents d’immigrants.

Cette synthèse importante, qui cible quelques questions centrales, apporte une pièce solide au débat et, comme le dit un des critiques du livre, l’ouvrage est d’autant plus crédible que les auteurs y sont allés avec sobriété, rigueur et passablement d’expertise. Tous les spécialistes qui ont analysé cet ouvrage en conviennent. Ces deux auteurs veulent mettre en garde les intervenants politiques afin qu’ils ne nourrissent pas de trop fortes attentes face aux effets bienfaiteurs possibles des politiques d’immigration.

Ce livre très éclairant contribue à rendre le débat public plus sérieux, car dans ces questions, il est difficile de discuter sérieusement en public de ces sujets complexes. Personne ne veut paraitre intolérant. Les auteurs dénoncent la rectitude politique qui joue un rôle-clé dans la diffusion au Québec des préjugés sur les effets de l’immigration. Alors que les études sur les difficultés croissantes d’intégration des cohortes d’immigrants se multiplient, ces études n’ont pas empêché l’optimisme populaire de croitre. Face au préjugé quant à l’impact économique positif de l’immigration, on constate depuis 15 ans que l’idée chez les Canadiens que l’immigration a un effet globalement positif sur l’économie a augmenté pour atteindre 80% aujourd’hui.

Au Canada, l’opinion favorable à l’endroit de l’immigration est en partie le fruit d’une propagande des institutions publiques avec la promotion du multiculturalisme. Saluant cet ouvrage, l’économiste Gilles Paquet qui dénonce encore plus vivement le «consensus canadien factice» en matière d’immigration renchérit en affirmant qu’il s’agit d’une croyance que les faits ne corroborent pas. C’est seulement parce que les représentants gouvernementaux de l’Immigration et les médias ont désinformé systématiquement les citoyens que ceux-ci ont été amenés à croire que les avantages économiques de l’immigration massive étaient par définition plus grands que les coûts qui en découlent pour les finances publiques du Canada ou pour la culture publique commune. Il dénonce la doctrine du multiculturalisme et son fonctionnement au moyen de la Charte canadienne des droits et libertés visant à faire croire à la population canadienne que la diversité est le bien suprême et la marque de commerce du pays: cette propagande vise à discréditer toute critique à ce sujet. Comme le dit encore Gilles Paquet, l’énorme mérite du travail de Dubreuil et Marois est de «faire un examen rigoureux de cette question». Les auteurs ne font pas une plaidoirie contre l’immigration massive: ils se contentent de démontrer fort bien que c’est un remède imaginaire au manque de croissance économique et au vieillissement de la population». Dans une autre partie de l’ouvrage, «ils attirent l’attention sur certains aspects ubuesques du régime d’immigration actuel, notamment sur l’incurie qui règne dans la sélection des immigrants, sur les excès auxquels a donné lieu la politique canadienne de réunification des familles, sur le leurre que constitue la figure de l’immigrant investisseur, etc.»

Bref, nous avons ici un livre très utile dans le débat public sur l’immigration et qui nous en apprend beaucoup sur la situation. Il rend compte des résultats obtenus par des recherches bien établies et montre la pertinence de ces travaux dans l’analyse des politiques d’immigration. Les préjugés ne logent pas toujours chez les gens de droite. Il est intéressant de constater que l’on peut s’appuyer sur des arguments raisonnables et des travaux scientifiques pour contrer la rectitude politique. Merci aux auteurs d’avoir permis un débat plus libre.

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