Françoise Graton, que les habitués des soupers-conférences annuels de L’Action nationale connaissent comme une amie fidèle de la revue avec son compagnon Gilles Pelletier, est décédée le 7 novembre 2014, à 84 ans, deux semaines après notre dernière rencontre. Toujours aussi vive et allumée, elle avait tenu à poser une dernière question au conférencier Mario Beaulieu. Elle l’avait fait sans micro avec l’aplomb de l’actrice de talent qu’elle était toujours.
Ci-contre, Françoise Graton posant sa question sous l’oeil complice de Gilles Pelletier lors du souper-conférence du 24 novembre 2014 au Lion d’Or (photo: Christian Gagnon).
Pour plusieurs d’entre nous, elle restera, avec ses compagnons, celle qui nous aura permis un premier contact avec un repertoire riche et varié en créant en 1964 la Nouvelle Compagnie théâtrale (NCT) dont la mission était de présenter les grandes oeuvres à une large partie de la population étudiante.
Et ce répertoire, il puisait autant dans les classiques étrangers, du passé ou contemporains, que dans les grandes pièces que commençaient à produire les auteurs québécois. S’ouvrir au monde, c’est surtout cela. Confronter les grands oracles grecs aux choeurs du Plateau. Voir nos drames dans ceux de peuples anciens, actualiser les grandes tragédies dans notre réalité. L’oeuvre de la NCT n’était pas banale. On pouvait y envisager tous les possibles dans un milieu foisonnant que les fabricants de « réalité virtuelle » d’aujourd’hui cherchent encore à reproduire en essayant d’imiter l’« interactivité » du théâtre !
L’importance d’un legs pareil est incommensurable. Donner à un peuple un tel goût du théâtre qu’on puisse maintenant voir sur toutes les scènes du monde sa dramaturgie toucher d’autres peuples, c’est allumer un feu qui continue d’alimenter sa vie réelle bien au-delà du départ inévitable de chaque individu.
Dans Le Devoir du 14 novembre dernier, les fondateurs du Théâtre de la Marmaille rappelaient comment ceux de la NCT les avaient supportés à leurs débuts :
Gilles Pelletier et Françoise Graton nous ont ouvert les bras et soutenus au moment où nous en avions le plus besoin, au début de notre aventure artistique.
Françoise avait une grande capacité d’émerveillement et un sens de l’organisation peu commun. Elle y était pour beaucoup dans l’esprit de famille que l’on sentait dans la place, ainsi qu’auprès des équipes de chaque spectacle de la NCT.
Le fonds d’archives de Françoise Graton est conservé au centre d’archives de Montréal de Bibliothèque et Archives nationales du Québec.