En tant que maire de la municipalité de Lanoraie dans la MRC d’Autray, je veux expliquer le cheminement du conseil municipal dans le dossier de l’oléoduc Énergie Est par TransCanada PipeLines.
Pour débuter, je tiens à rappeler que le conseil municipal de Lanoraie a adopté une résolution, et ce, à l’unanimité le 10 mars 2014, dans laquelle le conseil refuse de façon catégorique et énergique à ce que l’oléoduc passe sur le territoire de la municipalité de Lanoraie. Ensuite, la MRC de D’Autray a adopté une résolution d’appui, encore une fois de façon unanime, par les 15 maires de la MRC dès le 9 avril 2014. Le 4 février 2015, le conseil de la MRC de d’Autray adoptait une résolution unanime en s’opposant de façon catégorique et énergique au passage de l’oléoduc sur le territoire de la MRC.
Ce qui a amené le conseil municipal à se positionner aussi clairement, c’est l’opinion que nos citoyens exprimaient concernant nos tourbières ainsi que les milieux humides que nous avons à Lanoraie.
Au niveau de la MRC, nous avons commandé une étude indépendante, la première au Québec, afin de nous aider à prendre une position éclairée. Je crois qu’en tant que décideur, nous nous devons de garder l’esprit ouvert, surtout que la population nous a fait confiance pour que nous prenions les décisions pour le bien commun. Personnellement, cela m’a amené à une prise de conscience et cela m’a permis de développer mon opinion et mon argumentation afin de soutenir mes commettants, qui sont en l’occurrence les citoyens que je représente. Aujourd’hui, ma perception s’est cristallisée et je suis convaincu que nous devons résister avec les citoyens, car l’installation du pipeline va beaucoup plus loin que l’importante protection de nos tourbières et milieux humides ainsi que notre eau potable.
1- Avec ces installations, nous encourageons l’accroissement et l’utilisation du pétrole, alors qu’il est démontré et connu que l’utilisation des hydrocarbures des sables bitumineux contribue le plus à l’augmentation des gaz à effet de serre.
2- De plus, des déversements, c’est certain qu’il y en aura, car aucun système n’est parfait. Ce qui est inconnu, c’est le moment, l’endroit et l’ampleur. Partout où il y a un oléoduc, l’expérience nous démontre que des déversements il y en a, des petits et des plus grands… Attendrons-nous un désastre pour comprendre, intervenir et nous tenir debout ?
Je pense qu’il faut arrêter de penser que ceux qui ont une sensibilité à l’environnement nous empêchent d’avancer, car je crois que c’est le contraire. Ils nous ouvrent la porte à une prise de conscience et en voici un exemple. Lorsque nous prenons conscience que nous avons une mauvaise alimentation, quelle décision prenons-nous ? Continuer à remplir le garde-manger de mauvais aliments et, tant qu’à y être, en aménager un plus grand ? Ou, en tant que personne intelligente et mature, prendre la décision de stopper l’utilisation de mauvais aliments et ainsi nous obliger à prendre un virage vers la bonne alimentation afin d’augmenter notre espérance de vie et tenter de rétablir l’équilibre ?
Dans ce sens, je pense qu’il faut remercier les gens qui se lèvent pour nous faire prendre conscience qu’en augmentant notre consommation d’hydrocarbures nous courrons tous à notre perte. Le vrai enjeu n’est pas l’oléoduc, mais l’accroissement de la consommation des hydrocarbures. En cessant d’accroitre notre dépendance aux hydrocarbures, je pense que cela montre un signe de maturité et que c’est la seule façon de s’obliger à prendre un virage qui va stimuler le développement de nouvelles sources d’énergie.
Je pense qu’en tant que décideurs, nous devons prendre acte du message que les citoyens nous envoient et c’est pourquoi j’encourage la population du Québec à nous soutenir en se levant pour démontrer que ce projet est inacceptable et ramener nos représentants des gouvernements supérieurs à retrouver la raison et à cesser de penser que cela va tuer notre économie. Car c’est le contraire. En ralentissant le réchauffement planétaire, nous protégeons les générations futures.
Comme toute chose dans l’univers respire et se transforme, en tant que peuple, nous sommes tout simplement en train de grandir. En terme simple, ce qui est dans la terre reste dans la terre. Servons-nous de ce que la nature nous offre sur un plateau d’argent, soit le soleil, le vent et l’eau… et notre intelligence. Notre Terre Mère est notre habitat naturel, lorsqu’elle ne sera plus habitable où irons-nous vivre ?
Il ne faut surtout pas oublier que le gouvernement à la base, c’est la population. Nous, les élus, en sommes les représentants. NE L’OUBLIONS JAMAIS.
Selon la Loi, les droits de compagnies l’emportent sur le droit du propriétaire d’un terrain de s’opposer aux ambitions d’une compagnie pipelinière.
Le peuple se doit de se réapproprier sa souveraineté. Les compagnies, pour des intérêts économiques qui n’ont rien à voir avec l’intérêt des citoyens et sous des prétextes d’évolution et d’efficacité n’hésitent pas à hypothéquer les générations à venir.
Prenons l’exemple de TransCanada. Aucune mention n’est faite, dans son projet d’oléoduc, de la fin des opérations. Ce dernier est prévu pour une utilisation de 40 ans, mais par la suite, c’est le néant. D’ailleurs, Eugène Huzar a écrit un texte savoureux en 1855 – eh oui, il y a 150 ans –, qui s’intitulait « La fin du monde par la science ». Il invoquait le fait que le développement industriel ne voyait pas plus loin que le bout du nez.
Je suis de la fin de la génération des baby-boomers et je pense que beaucoup de choses ont évolué. Mais quand on pense à la dette qui ne cesse de grossir, on voit qu’on n’a pas toujours pris les bonnes décisions. Ce sont nos enfants qui vont devoir en faire leurs frais. Maintenant, nous avons l’opportunité de nous racheter en démontrant que nous ne sommes pas toujours menés par notre égo et que nous prenons en considération les faits que les groupes environnementaux nous mettent directement sous les yeux.
Faudrait-il avoir honte de défendre la prospérité environnementale plutôt que les pétrodollars, alors que prendre le virage que nous pouvons prendre ne peut que se transformer en dollar plus sain ? Autrement dit, c’est le temps de ramener l’argent noir à sa couleur naturelle soit le vert. Évidemment, le changement se fera à moyen, long terme, mais il faut amorcer le virage. Il est temps que les bottines suivent les babines.
C’est comme si les politiciens devaient avoir un sentiment de culpabilité en défendant les concitoyens qu’ils représentent démocratiquement. Je m’excuse, mais dans mon cas je n’irai ni contre mes concitoyens ni contre ma conscience. C’est comme si au sein d’une famille (micro gouvernement) le parent avait honte d’endosser une idée géniale pour le simple fait que cette idée vient de l’enfant.
Je me suis même fait dire lors d’une réunion avec les dirigeants de TransCanada, à qui je demandais de rencontrer les citoyens collectivement et qui refusaient : « Monsieur Jean, on ne peut faire ce genre de rencontres, car ce sont les verts qui en prennent le contrôle et foutent le bordel. C’est pourquoi nous préconisons les rencontres portes ouvertes ». La mentalité de ces entreprises milliardaires veut que ce soit eux qui possèdent la vérité.
Aujourd’hui, nous savons les dommages que nous avons faits à notre Terre Mère en ne regardant pas le futur. Nous connaissons les conséquences des gaz à effet de serre sur le réchauffement de la planète. On ne peut plus faire semblant, c’est la base de la conscience. Lorsque la lumière est allumée, cela devient de l’aveuglément volontaire.
J’aimerais mieux que nos descendants se souviennent que le choc de nos générations nous a amené vers une conscience collective plutôt que vers un point de non-retour que nous nous apprêtons à franchir concernant l’environnement et la destruction de notre civilisation.
Vous savez, lorsque nous arrivons sur la terre nous sommes nus et lorsque nous la quitterons ce sera de la même façon. Donc, que nous soyons des citoyens milliardaires ou des citoyens ordinaires, dans ce sens, on est tous égaux.
Je veux que les générations qui suivent puissent jouir d’une vie saine, n’est-ce pas ça l’amour, LE VRAI ?