Le démantèlement de la nation (chronique 10)

La période couverte s’étend du 22 décembre 2016 au 27 février 20171.

Le courage, c’est de savoir que tu pars battu, mais d’agir quand même sans t’arrêter.
– Atticus Finch, héros du roman de Harper Lee Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur

Le roman d’Harper Lee dont est tirée la citation en exergue est l’histoire d’un homme qui agit par conviction pour la défense d’une cause juste et doit, ce faisant, affronter tous les pouvoirs de la société américaine des années 1930, ligués contre celle-ci. Nous, Québécois qui défendons notre petite nation et son État contre les assauts dirigés contre eux sans relâche, nous avons besoin de nous souvenir de cette définition du courage. Pour garder la lampe allumée, il nous faut aussi ce mot de Félicité de Lamennais cité souvent par Rosaire Morin, qui fut directeur de cette revue :

Quand même nos espérances auraient été trompées
non seulement sept fois, mais septante fois sept fois,
ne perdez jamais l’espérance !

Le courage et l’espérance des Noirs et des « Atticus Finch> » qui se sont joints à eux ont fini, après plusieurs décennies de lutte, par donner des victoires aux combattants pour les droits civiques. Victoires partielles et plombées de certains reculs, combat toujours à reprendre : il reste que grâce à ces victoires, même fragiles, la lutte pour les droits civiques est devenue une cause légitime aux yeux de tous les Noirs et d’une grande partie du monde.

Nous, indépendantistes, partons de plus loin : les défaites répétées des Québécois, tant sur de grands que sur de moindres enjeux, expliquent que nous en soyons encore à devoir convaincre une partie de nos compatriotes que la défense de l’avenir passe par l’indépendance nationale. Notre État, notre société civile, nos repères culturels et nos valeurs sont sous attaque, une attaque qui vise à les désarticuler. Puisse cette chronique montrer comment cet objectif est mis en œuvre. Ce n’est pas une théorie du complot. Car malheureusement, les faits parlent d’eux-mêmes.

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Le Québec perd chaque jour un peu plus de son rapport de force au Canada. Le Canada se dessine comme pays unitaire ; le gouvernement fédéral bafoue constamment la constitution qu’il nous a imposée ; les compagnies à charte fédérale poussent désormais l’insolence jusqu’à dénier toute légitimité aux lois québécoises. Quant aux excuses officielles de la première ministre ontarienne Kathleen Wynne pour l’imposition du Règlement XVII, elles ne peuvent faire oublier que dans toutes les provinces y compris en Ontario, les minorités francophones doivent tous les jours mener un combat de Titan pour faire valoir leurs droits.

À Québec, le gouvernement libéral de Philippe Couillard collabore lui-même à délégitimer notre État face à Ottawa et aux entreprises à charte fédérale. Il procède sans vergogne au démembrement du seul outil collectif qui nous reste : les projets de « cité-État » du maire Coderre, que les libéraux encouragent, vont en ce sens. Le gouvernement Couillard retire à notre État les moyens de structurer le territoire, la société et évidemment la nation. Il vise délibérément à fragmenter la communauté politique qu’est le Québec dans son intégrité. En même temps, comme le montrent bien Christian Jetté et Yves Vaillancourt dans un article cité plus loin, ce gouvernement centralise plus que jamais le pouvoir de décision et la gestion des organisations, car il veut aussi détruire la cohésion de la société civile, à l’échelle des régions comme à celle de la nation tout entière. Enfin, que dire de la situation de l’économie québécoise depuis deux ans que ce gouvernement est au pouvoir, sinon que « l’effet libéral » est dévastateur !

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1. Une logique d’occupation par le Gouvernement fédéral et les entreprises à charte fédérale

L’intérêt national du Canada n’est pas celui du Québec. La décision définitive sur le projet Énergie Est sera prise selon « l’intérêt national », a souligné le ministre fédéral des Ressources naturelles, Jim Carr. D’ailleurs, le premier ministre Trudeau a déjà mentionné qu’il pourrait considérer ce projet favorablement, moyennant certaines garanties. Dans cette affaire, qu’en est-il de l’intérêt national du Québec ? En vertu de la constitution, les provinces n’ont même pas le droit d’imposer une taxe indirecte sur des ressources naturelles non renouvelables extraites dans d’autres provinces. En conséquence, le Québec ne peut exiger la moindre redevance sur le pétrole transporté par oléoduc sur son territoire (28 janvier).

Les compagnies à charte fédérale se conduisent en barons colonialistes.

  • Secure Energy. À son tour, cette compagnie a refusé de déposer un avis de projet au gouvernement du Québec. Elle estime que le Québec n’a pas à s’intéresser au projet de faire traverser notre territoire par 220 wagons de pétrole sale par jour. Secure Energy ne reconnaît que l’autorité fédérale (17 février).
  • Tout de même, Paule Halley, professeure de droit à l’Université Laval, soutient que ces entreprises à charte fédérale, telle TransCanada, ne peuvent prétendre échapper à la Loi sur la qualité de l’environnement du Québec. De même, le gouvernement du Québec ne peut renoncer à son pouvoir. Madame Halley se fonde pour avancer ces idées sur un jugement récent de la Cour suprême de Colombie britannique (23 février). Nous avons donc affaire ici à un gouvernement Couillard dont la complaisance à l’égard des pétrolières canadiennes équivaut à une trahison des intérêts fondamentaux de la nation québécoise (voir la définition du mot « trahison » dans le Larousse).

Ottawa ne soutient pas l’économie québécoise. Ottawa laisse tomber le secteur du bois d’œuvre en renonçant à exiger des États-Unis le respect du traité de libre-échange. Selon l’ancien négociateur Carl Grenier, le gouvernement Trudeau agit ainsi sous la pression de la Colombie-Britannique. Dans les derniers dix ans, le Québec a perdu 40 000 emplois dans le secteur forestier (18 février).

Ottawa soutient l’économie albertaine sans poser de conditions à cette province. À cause de la baisse des revenus du pétrole, le gouvernement fédéral répond à la demande de la première ministre Rachel Notley et donne 250 millions à l’Alberta (24 février). Mais attention, ce n’est pas de la « péréquation » (transfert d’argent du fédéral aux provinces moins riches), puisque ce transfert n’a pas été fait en passant par ce programme !

2. Le Canada, un pays multinational qui refuse de se reconnaître comme tel et prend les moyens pour ne plus l’être

En Ontario, ne pas soutenir la création d’une université de langue française. La première ministre Kathleen Wynne remet en question la pertinence de créer une université campus exclusivement de langue française en Ontario ; il n’y en a actuellement aucune. Elle serait davantage prête à investir dans des programmes à distance, laissant les étudiants sans véritable communauté physique d’ancrage. L’assimilation est une perspective plus que réelle dans cette province. Pour une population équivalente, les anglophones du Québec disposent de trois universités, dont deux sont vraiment riches (19 février).

3. Le Canada, un État fédéral qui s’en va plus résolument que jamais vers un État unitaire

Relancer le projet d’agence pancanadienne des valeurs mobilières. Les libéraux poursuivront le projet conservateur, et ce même si les valeurs mobilières sont de compétence provinciale (12 janvier).

Décider ultimement les conditions de la vente de nos fleurons. La nouvelle ministre de l’Économie, Dominique Anglade, a dû reconnaître que, malgré qu’elle en ait, ce n’est pas Québec, mais bien Ottawa qui décidera si les garanties offertes par Lowe’s pour acquérir Rona sont suffisantes. Tout ce que la province peut faire, s’est-elle rendue compte, c’est de transmettre ses attentes au Bureau de la concurrence et Investissement Canada ; d’ailleurs, a-t-elle affirmé, c’est justement cela « qui est important pour nous » (10 février).

Imposer des conditions aux transferts en santé. La santé est une compétence provinciale exclusive. Ce que devrait transférer Ottawa, ce sont des points d’impôts. Évidemment, cela fait des décennies que cette revendication historique (et désormais abandonnée) du Québec n’est pas satisfaite, au point que la santé est de facto devenue une compétence partagée. Ottawa en effet préfère transférer des budgets, dont il détermine arbitrairement les niveaux et les conditions d’utilisation. Le ministre Barrette s’en émeut, il veut des transferts sans condition (12 février). Il connaît mal l’histoire du Canada.

Transiger directement avec les villes. Les villes ne sont pas un palier de gouvernement selon la constitution canadienne. Ce sont de simples administrations qui dépendent des gouvernements provinciaux. Mais de plus en plus, le gouvernement fédéral passe par-dessus les provinces et fait affaire directement avec les villes. Le financement des infrastructures est au cœur de ces discussions : voilà un autre sujet de compétence provinciale. Mais depuis quand Ottawa respecte-t-il la constitution ? Au lieu de céder des points d’impôt aux provinces pour que celles-ci exercent pleinement leurs compétences et décident des infrastructures prioritaires, y compris en partenariat avec les municipalités, Ottawa procède ainsi : a) il accepte de payer directement pour les infrastructures municipales et même d’augmenter sa part dans leur financement ; b) il se réserve le droit d’imposer ses conditions aux provinces (qui continuent malgré tout pour l’instant de recevoir l’argent puisque ce sont elles qui ont la compétence constitutionnelle) afin que soient financés en priorité les infrastructures municipales (5 et 6 février) ; c) Ottawa tarde aussi à s’entendre avec le gouvernement Couillard à propos du Fonds Chantiers Canada, si bien que l’Union des municipalités du Québec est plus désireuse que jamais que les villes puissent transiger directement avec le fédéral (8 février). Pour en arriver à une entente, qu’il annonce imminente, le gouvernement du Québec devra-t-il céder aux exigences fédérales et fasse approuver ses projets un par un ?

Laisser dire l’Institut C.D. Howe, qui plaide pour une « direction fédérale forte » dans le secteur du travail. Il faut entendre par là que cet institut souhaite l’instauration de politiques publiques fédérales fermes dans un domaine dont plusieurs aspects sont de compétence provinciale exclusive, en particulier la formation continue et la formation initiale. On verra ce que fera le gouvernement Trudeau ; mais on connaît la tendance centralisatrice des gouvernements du PLC ainsi que les liens qui unissent traditionnellement ce parti et cet institut (Le ministre Bill Morneau est un ancien président du conseil d’administration du C.D. Howe) (3 février).

Imposer l’uniformité coast to coast dans l’aide médicale à mourir. Les représentantes du ministère fédéral de la Santé sont venues plaider en ce sens devant le comité de députés et sénateurs chargés de recommander au gouvernement Trudeau un encadrement législatif sur l’aide médicale à mourir (26 janvier). Rappelons que quoique l’on puisse penser de la loi québécoise sur ce sujet, elle a été adoptée par large consensus à l’Assemblée nationale et elle se situe entièrement dans le champ des compétences du Québec. Toute prépondérance d’une éventuelle loi fédérale qui obligerait à invalider certains aspects de la loi québécoise serait donc un nouvel empiétement d’Ottawa contraire aux dispositions de la constitution. Or, c’est précisément ce vers quoi on se dirige si Ottawa fait siennes les recommandations du comité fédéral (26 février).

Donner à la commission d’enquête fédérale sur les femmes autochtones disparues ou assassinées un mandat qui empiète sur les compétences des provinces. Il semble qu’un volet de l’enquête concernera les rapports entre les policiers et les Autochtones (22 janvier et 17 février). Or, d’une part, les corps policiers provinciaux, comme la Sûreté du Québec, sont évidemment de juridiction provinciale ; et d’autre part, les services aux Autochtones qui vivent à l’extérieur des réserves, en milieu urbain, sont de responsabilité québécoise (15 février). Il faut dire toutefois que depuis qu’a éclatée l’affaire des violences policières envers des femmes autochtones à Val d’Or, doublée de celle de la mort d’un jeune Autochtone et d’un jeune policier le 13 février, le gouvernement du Québec n’a jamais été empressé de prendre ses responsabilités dans cette affaire, trop heureux de laisser aux mains d’Ottawa un autre pan de ses propres compétences.

4. La haine du Québec français semble animer le gouvernement libéral de Philippe Couillard

Diminuer de moitié le budget dédié à la francisation en entreprise. Des centaines d’employés n’ont plus accès à des cours de français au travail. La francisation est un parent pauvre des mesures d’intégration à la société québécoise. La ministre Weil veut même alléger les exigences pour certains travailleurs, cédant ainsi aux réclamations de plusieurs organismes patronaux, tels que Manufacturiers et exportateurs du Québec (3 et 9 février). En décembre ٢٠١٤, le gouvernement Couillard avait déjà diminué le poids relatif de la connaissance du français pour les immigrants qui font une demande de résidence permanente (Michel David, 4 février).

Augmenter les seuils d’immigration à un niveau insoutenable. À 50 000 par an, le nombre des immigrants est déjà trop élevé pour la capacité d’accueil du Québec (intégration en emploi et intégration culturelle et linguistique). Le Conference Board a suggéré de monter le seuil à 65 000 et même à 90 000, suggestion reprise par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Le gouvernement Couillard est tenté d’aller en ce sens malgré les avertissements qui proviennent d’économistes aussi respectés que Pierre Fortin, selon qui des seuils dépassant autant la capacité d’intégration peuvent détruire la cohésion sociale du Québec (11 février).

Penser à réformer le financement universitaire d’une manière avantageuse pour les établissements anglophones. Alors que le système d’éducation anglophone, 40 ans après la Loi 101, continue d’accueillir de la maternelle à l’université un nombre supérieur d’élèves et d’étudiants que le poids démographique de cette communauté au Québec (Éric Bouchard, 11 janvier), le gouvernement Couillard envisage d’aider les universités à compenser une partie des compressions qu’il leur a imposées en haussant de 25 % les frais de scolarité des étudiants étrangers. Or, la capacité d’attirer des étudiants et de les faire payer davantage est plus élevée dans les universités anglophones. Pas moins de ٤٠ % des étudiants venus de l’étranger fréquentent les universités McGill et Concordia (La Presse+, 3 février). La ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, s’interroge sur le bien-fondé d’une augmentation pénalisante pour les universités francophones (20 février) ; mais n’ayant été, de son propre aveu, ni consultée ni même informée par son confrère de l’éducation, on doit constater son faible poids au conseil des ministres.

Briser le modèle de démocratie participative inscrit dans notre histoire. Excellente analyse de Jetté et Vaillancourt dans Le Devoir du 5 février. Je résume. Depuis une bonne cinquantaine d’années, l’État québécois a encouragé la participation de la société civile dans le développement social du Québec. Un très grand nombre de politiques publiques ont été adoptées grâce à l’engagement d’organismes issus des communautés et à la mise en place de dispositifs de participation citoyenne. Mais désormais, le gouvernement Couillard coupe « les réseaux qui permettent à la société civile d’influer sur l’État : disparition des CRÉ, fin du financement de Solidarité rurale du Québec, coupes dans le financement des CPE et du programme accès logis Québec, modifications majeures du financement des CLD, des CDEC et des tables régionales de développement social ». Jetté et Vaillancourt voient dans ces décisions une « attaque en règle du gouvernement contre le pouvoir politique de la société civile ». S’y ajoute « la disparition des gestionnaires élus à la tête des établissements publics de la santé et des services sociaux et la recentralisation du réseau ; la remise en question du rôle sociopolitique des organismes communautaires ». Bref, tout le modèle québécois de développement social est mis à mal. Ces outils disparaissent ou sont désormais désarticulés ; on ne pourra plus s’appuyer sur eux pour organiser la contestation de l’ordre néolibéral et la reddition du Québec à Ottawa imposées par le gouvernement Couillard. Comme le fait remarquer Bernard Descôteaux à propos de la réforme de la gouvernance en santé et du projet de loi 86 sur les commissions scolaires, « le gouvernement Couillard, partout où il le peut, n’a de cesse de centraliser autour de lui le plus de pouvoirs possibles » (14 janvier). C’est aussi l’analyse que font les comités de parents (17 février) et l’expert Christian Maroy, de l’Université de Montréal (19 février).

Lyncher sans procès notre plus grand cinéaste. Tout a été dit sur cette affaire. Sur la foi d’allégations énoncées par un homme qui tient encore à garder l’anonymat plus de trente ans après la mort de Claude Jutra, la ministre David a décidé de rayer notre plus grand cinéaste de la mémoire collective (18 février) ; des événements ou établissements dont une part significative du financement dépend du ministère de madame David ont immédiatement emboîté le pas ; la Ville de Montréal s’est mise de la partie. Depuis, un autre homme a parlé, celui-là à visage découvert : il accuse Jutra d’avoir tenté, une fois, d’avoir une relation sexuelle avec lui quand il avait 12 ou 13 ans. Une tentative qui s’est arrêtée là et des allégations anonymes, et on condamne Jutra sans procès (notre système juridique, rappelons-le, repose sur le droit à un procès juste et équitable y compris post-mortem). On a rarement vu aussi violente exécution publique dans notre histoire (semaine du 15 février).

5. L’« effet libéral » dans l’économie québécoise
a) Incompétence générale ou travail contre l’intérêt national du Québec ?

Garder le cap sur l’austérité. Selon l’économiste Pierre Fortin, la politique d’austérité du gouvernement Couillard a coûté l’équivalent de 1 % du PIB du Québec (cité par Éric Desrosiers, 30 janvier). D’ailleurs, le PIB du Québec s’est une fois de plus replié en octobre (22 janvier). Pourtant, selon la majorité des économistes, dans un contexte de ralentissement économique et de menace de récession, il faut des politiques qui stimulent l’innovation et les immobilisations pour soutenir la croissance. C’est du reste ce que recommande l’ancien ministre québécois libéral Clément Gignac, désormais économiste en chef à l’Industrielle Alliance (Le 24/60, RDI, 20 janvier). Même l’OCDE implore les États de profiter de la faiblesse des taux d’intérêt pour « mener des politiques budgétaires expansionnistes » (19 février).

Ne pas doter le Québec d’une véritable politique de développement économique : cette inaction du gouvernement Couillard, c’est le Centre sur la productivité et la prospérité de HEC qui la lui reproche (26 janvier). Ce gouvernement est jugé sans vision même dans sa propre famille idéologique.

Ne pas avoir donné suite à la Politique nationale sur la recherche et l’innovation élaborée par le précédent gouvernement, ni l’avoir remplacée par une nouvelle politique d’innovation. Le président de l’ACFAS, Frédéric Bouchard, s’alarme « Chaque mois sans politique, c’est un mois de plus où des chercheurs québécois ne peuvent pas établir de nouvelles collaborations à l’extérieur ». Des compagnies hésitent à investir parce qu’ils n’ont pas d’engagements financiers à long terme du gouvernement : « le milieu pilote à l’aveugle », dit-il (18 janvier).

Ne pas créer un environnement susceptible de favoriser la confiance des PME. Les libéraux ont-ils assez souvent dit qu’un gouvernement péquiste séparatiste ne peut qu’éloigner les investissements ! Or, selon la Banque de développement du Canada, les PME manufacturières du Québec sont actuellement « frileuses ». Ailleurs au Canada, les entreprises manufacturières ont recommencé à investir (28 janvier). Mais le gouvernement Couillard ne réussit pas à créer un cadre qui encourage les nôtres à en faire autant. Le ministre Leitao déplore l’insuffisance des exportations (26 janvier). Il a bien raison. En 2015, les exportations du Québec ont augmenté de seulement 4,5 % (23 février). Et celles de l’Ontario de 12,1 %. (Bureau de la responsabilité financière de l’Ontario, 10 février 2016.)

Accepter de perdre nos sièges sociaux. Pour une compagnie Lise Watier Comestiques qui redevient québécoise après avoir été contrôlée pendant une dizaine d’années par un fonds d’investissement ontarien (19 février), combien de fleurons perdons-nous ? En ne s’opposant pas à la vente de Rona, le gouvernement Couillard a accepté de perdre un autre siège social et de laisser passer en des mains étrangères le plus beau fleuron de la quincaillerie québécoise. Non seulement l’américaine Lowe’s acquiert-elle Rona, mais les détaillants indépendants Rona sont tous en train d’être courtisés par des bannières canadiennes ou américaines. Boucherville ne sera plus le site que d’un siège social régional, sans beaucoup de pouvoir de décision. Tous les experts s’entendent pour dire qu’à terme, l’approvisionnement en produits québécois diminuera chez Rona, affectant ainsi l’économie déjà fragile de plusieurs régions (4, 6 et 10 février). Pendant ce temps, la multinationale Rio Tinto ne respecte pas les engagements pris au moment où elle a acquis Alcan : elle annonce le licenciement de 200 cadres au Québec. Mais pour le ministre Carlos Leitao, ce n’est « pas une catastrophe » (18 février).

Précariser l’industrie nationale du taxi en tolérant la concurrence illégale du service UberX dans le transport des personnes. Le premier ministre Couillard a évincé Robert Poëti du ministère des Transports et décidé qu’à Montréal et au Québec le service UberX serait le bienvenu. Tant pis s’il est bien connu que la multinationale californienne ne veut pas de contraintes et ne respecte pas les ententes qu’elle signe (2 février). Aux dernières nouvelles, la compagnie a méprisé ouvertement l’autorité du gouvernement en commission parlementaire et elle a explicitement refusé de respecter les lois et règlements qui régulent l’industrie québécoise du taxi ; au 24 février, elle n’avait pas encore daigné répondre à la demande du ministre Daoust de lui ouvrir ses livres (19, 20 et 24 février).

Ne pas soutenir les entreprises nationales de technologies numériques. Le premier ministre Couillard veut que le Québec participe à la « quatrième révolution industrielle », celle des technologies numériques. Or, il le fait en offrant son aide aux entreprises étrangères (comme Cinesite par exemple, 9 février). Il crée donc une concurrence déloyale en défaveur des entrepreneurs québécois (Éric Gervais-Després, 15 février).

Ne pas soutenir notre industrie de médicaments génériques. De l’article d’Éric Tétrault, président de Manufacturiers et Exportateurs du Québec (22 janvier), je retiens surtout deux choses. 1. Lorsque les grosses multinationales du médicament breveté ont quitté le Québec, ce sont les PME québécoises de médicaments génériques qui ont pris la relève et maintenu l’expertise québécoise mondialement reconnue dans ce secteur. Preuve qu’il vaut mieux miser sur nos entreprises que sur des compagnies étrangères pour assurer le développement économique du Québec à long terme. 2. Or, le ministre Barrette, qui veut économiser quelques dollars, a prévu dans le projet de loi 81 de procéder à un appel d’offres aux enchères à la baisse pour obtenir le plus bas prix pour des médicaments couverts par le Régime général d’assurance-médicaments, quitte à mettre en compétition inégale nos PME avec les géants asiatiques du médicament générique. Assistera-t-on sous ce gouvernement à la précarisation d’un autre de nos secteurs de pointe ?

Ne pas repenser la stratégie du Québec dans l’aéronautique. Bell Hélicopter supprime 200 emplois de plus à Mirabel ; dans cinq ans, il ne restera plus que la moitié des 2000 employés qui travaillaient là au moment où le gouvernement libéral a été élu au printemps 2014 (12 février). Le professeur Mehran Ebrahimi, spécialiste du management du secteur de l’aéronautique à l’UQAM, explique que la construction d’hélicoptères civils est en difficulté partout au monde ; mais que ce qui manque ici, c’est une stratégie concertée entre le gouvernement et les entreprises pour repositionner le Québec comme joueur incontournable dans au moins un ou quelques sous-secteurs de l’industrie (Journal de Montréal et le 15-18 Ici RC Première, 11 février). Parallèlement, Bombardier annonce la suppression de 2400 emplois au Québec (18 février).

Ne pas réussir à arracher un engagement clair d’Ottawa en faveur de Bombardier, (30 janvier et 17 février). Plusieurs commencent à penser qu’Ottawa ne s’engagera que si Québec laisse passer l’oléoduc Énergie-Est (17 et 19 février). D’autres rumeurs courent qu’Ottawa n’investira que si ses représentants obtiennent des sièges au conseil d’administration de l’entreprise (27 février).

Troquer la poursuite en Cour suprême contre Air Canada (gagnée en Cour d’appel) pour obliger cette compagnie à honorer ses engagements envers Aveos et ses 1800 employés montréalais contre une simple promesse d’acheter des avions CSeries et de créer un centre d’entretien pour ces appareils (6 janvier ; 19 et 24 février).

Laisser les secteurs agricole et agroalimentaire sans plan de développement. Malgré l’importance de ces deux secteurs pour l’autosuffisance alimentaire du Québec et le développement économique régional, et malgré les nouvelles menaces qui pèsent sur eux depuis les accords avec l’Union européenne et l’Accord de partenariat transpacifique, le gouvernement Couillard se désengage, déplore l’Union des producteurs agricoles (27 janvier). Philippe Mollé souligne que toutes les PME vouées à l’agroalimentaire « en arrachent » à l’heure actuelle (27 février).

Faire servir le Fonds vert à des projets très éloignés des objectifs de développement durable, tels que le financement de l’oléoduc d’une pétrolière entre Montréal et Lévis ; et plus généralement, gérer ce fonds de manière très relâchée (6 février).

Continuer d’investir dans le Plan Nord, et ce malgré la chute vertigineuse des cours mondiaux des minerais. La minière Cliffs Resources est en faillite. Qu’à cela ne tienne ! Le gouvernement lui rachètera pour 68 millions $ d’actifs (2 février). Le gouvernement s’associera aussi à Tata Steel, alors que plusieurs analystes, à Desjardins et ailleurs, annoncent que les coûts du fer resteront encore bas pour les prochaines années (21 janvier). Plan nord, plan nord : des dizaines millions de dollars de fonds publics ont été investis par les libéraux dans plusieurs projets douteux, dont celui de Cliffs Resources justement (2 février).

Rester vague à propos de la Stratégie maritime. Après une annonce en grande pompe en juin 2015, plus rien ne filtre de ce côté. Le gouvernement peine-t-il à attirer des investissements et des projets ? Tout ce qu’on sait, c’est que l’optimisation du Port de Montréal et l’expansion du Port de Québec sont prévues, à partir de sommes versées en partie par le gouvernement fédéral (18 janvier).

b) Les compagnies amies épargnées

Pétrolia, encore et toujours ? Renier la signature de l’État québécois sur l’exploitation des hydrocarbures à Anticosti, s’ingérer dans le processus administratif d’autorisation ou plutôt, désormais, de refus d’autorisation des forages (6 et 11 février), faire en sorte qu’Investissement Québec « attende les ordres du gouvernement » (17 février) : tout cela revient presque à solliciter Pétrolia de poursuivre le gouvernement. Autre manière pour les libéraux de venir en aide à leurs amis, alors qu’il apparaît de plus en plus clair que cette exploitation ne sera jamais rentable ? Plusieurs analystes, et parmi eux Michel David, se posent la question (11 février).

TransCanada et autres pétrolières. L’autonomie que fait miroiter le gouvernement Couillard aux municipalités ne va pas jusqu’à permettre à celles-ci de décider de la distance à établir entre les forages pétroliers et leurs sources d’eau potable. Les municipalités devront se conformer aux règles très complaisantes fixées par le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (RPEP). Il ne faudrait quand même pas que les projets pétroliers et gaziers soient compromis ! (5 et 6 février)

TransCanada et autres pétrolières Au début de l’année, TransCanada a embauché le fils de l’ancien chef du PLQ Claude Ryan comme lobbyiste pour le pipeline Énergie Est (9 janvier). À la fin de janvier, c’est au cours d’un cocktail organisé par une firme d’avocat et de lobbyistes à la fois proche du PLQ et de plusieurs entreprises minières, pétrolières et gazières que le ministre Pierre Arcand a présenté les orientations de la future politique énergétique du Québec (14 janvier).

Secure Energy. Malgré Lac-Mégantic, le gouvernement Couillard ne mandatera pas un BAPE pour étudier le projet de transport de pétrole par train vers le port de Belledune au Nouveau Brunswick. Dès 2017, 220 wagons pleins de pétrole bitumineux traverseront donc tous les jours le Québec, et notamment Rivière-du-Loup, Trois-Pistoles et Rimouski (17 février).

Arianne Phosphate. Même les compagnies québécoises ne reconnaissent pas la compétence du Québec. Méprisant encore une fois l’avis du BAPE, qui juge que le projet minier de Lac à Paul au Saguenay ne doit pas être autorisé avant que le port construit pour exporter le minerai ait fait l’objet d’une évaluation environnementale québécoise, le premier ministre Couillard donne le feu vert. La minière Arianne Phosphate refuse en effet que le projet de port fasse l’objet d’un BAPE, puisque le port serait de compétence fédérale (23 décembre). Le premier ministre laisse faire. Et encore plus que d’habitude : la mine est située dans son comté.

Activités funéraires. Le projet de loi 66 sème l’inquiétude à cause de sa tendance à « l’arbitraire, à l’autoritarisme et à l’uniformisation » (Jean-Claude Leclerc, 1er février). Au point où ce journaliste écrit : « Après le scandale du trafic libéral des garderies et le mépris qu’il supposait à l’égard des enfants, le Québec n’a pas besoin d’un régime discrétionnaires ouvrant la porte à des permis libéraux pour le soin des morts. Trop d’arbitraire grève le projet de loi 66. »

6. L’éventrement de l’État québécois
a) Briser le sentiment d’appartenance des Québécois à leur État

Interdire aux employés des secteurs public et parapublic de critiquer « le bien fondé des politiques et objectifs de programmes du gouvernement (article ٤ du projet de loi ٨٧). Le projet de loi sur les lanceurs d’alerte est insuffisant, selon les analystes. Il empêche notamment les employés des secteurs public et parapublic de dénoncer les mauvaises pratiques de l’État québécois. Bref, le gouvernement fait fi de plusieurs recommandations de la Commission Charbonneau (11 février). Brian Myles parle d’ailleurs du « silence assourdissant » du gouvernement Couillard sur les enjeux éthiques liés à l’octroi des contrats publics (25 février).

Modifier le processus des plaintes dans les hôpitaux. Le gouvernement du Québec contrevient à sa propre loi. Depuis la Loi 10, les conseillers aux plaintes sont désormais des employés, qui n’ont pas l’indépendance requise pour faire respecter les droits des patients. La Protectrice du citoyen ayant dénoncé le fait et confirmé l’illégalité de nouveau processus de plainte, le ministre Barrette songe à changer la loi plutôt que de se conformer aux dispositions en vigueur dans la loi actuelle (23 février).

Saboter le Bureau des enquêtes indépendantes. Après des mois de blocage de la part du ministre suppléant Pierre Moreau, le nouveau ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a accepté de nommer au BEI les personnes recommandées par la directrice de cet organisme. Il n’empêche que ce Bureau souffre déjà d’un déficit de crédibilité : son indépendance est d’emblée mise en doute compte tenu que la moitié des enquêteurs seront obligatoirement des anciens policiers. Or, les liens entre les divers corps de police et le Parti Libéral du Québec sont extrêmement étroits. L’expert Jocelyn Caron parle même de « symbiose » entre les libéraux et la police au Québec (25 janvier). Encore une fois, le rapport de la commission Charbonneau a vite été tabletté.

Contrôler l’UPAC. La décision de laisser Robert Lafrenière poursuivre le travail de l’UPAC repose exclusivement entre les mains du gouvernement libéral. La CAQ et le PQ souhaiteraient que le commissaire soit élu par les deux tiers des députés. Quand saurons-nous le fin mot sur le financement illégal du Parti libéral du Québec ? (Jean-Claude Leclerc, 4 janvier ; 24 février). Brian Myles fait remarquer d’ailleurs que deux enquêtes majeures sur le financement du Parti Libéral du Québec « n’ont généré aucun résultat » (25 février).

Bénéficier de financement illégal. « Les libéraux financés illégalement par un éminent comptable », Luc Villeneuve. Et onze fois plutôt qu’une. Est-ce un hasard que l’associé Villeneuve, qui s’appelle Pierre Laporte, ait été l’an dernier nommé par le gouvernement libéral président du conseil d’administration de la Société de développement des entreprises culturelles ? (16 janvier)

Abandonner les plus vulnérables.

  • Les compressions dans les services sociaux sont en grande partie responsables de l’augmentation des fugues de jeunes filles au Centre jeunesse de Laval ; celui-ci en est réduit à devoir verrouiller ses portes, car il ne peut pas compter sur l’ajout de personnel et de services spécialisés (6 et 12 février).
  • La lutte contre l’exploitation sexuelle des mineures semble avoir été laissée de côté depuis l’élection des libéraux. Le plan lancé tout récemment ne couvre qu’une infime partie du problème, selon les organismes sur le terrain (18 février).
  • Les centres d’aide contre le suicide crient à l’aide (2 février).
  • Les projets de logement social en région sont paralysés faute de fonds (٢٤ janvier).
  • Il a fallu le scandale de la fermeture de Mélaric pour que Québec décide de débloquer des fonds pour les centres de désintoxication (21 janvier).
  • Les utilisateurs de transport adapté peuvent de moins en moins compter sur celui-ci (15 février).
  • Pas un sou de plus dans les soins à domicile, malgré l’augmentation prévisible de la demande en raison du vieillissement de la population (29 décembre).

Saccager les universités de langue française. La crise entre l’École des sciences de la gestion et la direction de l’UQAM ne date pas d’hier, c’est certain. Mais l’ampleur des compressions que subit cet établissement a exacerbé les divisions, sur cela au moins les deux parties s’entendent (24 février). Et ce n’est pas la réforme du financement universitaire telle qu’elle est envisagée (voir plus haut) qui risque d’améliorer la situation de la grande université publique montréalaise.

Saccager l’éducation publique. Une école de Gatineau fait vendre du chocolat par ses élèves : une partie du surplus servira à acheter des chaises et des pupitres (6 février). Un programme pour intéresser les jeunes aux sciences, dans le Bas-Saint-Laurent, devra probablement fermer, faute de financement (25 février). Récemment, celui qui cherchait à intéresser les filles aux sciences a lui aussi été gravement amputé.

Saccager les services de garde publics. Ceux en milieu scolaire sont « au bord de l’implosion » (13 février) ; quant aux CPE, on dirait que ce gouvernement ne cessera de s’acharner sur eux que lorsqu’ils auront complètement disparu (13 et 20 février).

Asphyxier le système de santé public. Les établissements de santé de l’est de Montréal doivent trouver pas moins de 7,4 millions $ d’ici la fin de mars pour équilibrer leur budget (29 janvier).

Couper dans la couverture des médicaments. Des aînés risquent de perdre la vue parce que la Régie de l’assurance-maladie a changé ses règles (24 février).

Laisser le système de justice « abandonner les Inuits », dixit la Protectrice du citoyen Raymonde Saint-Germain. Le nouveau ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, s’est engagé à mettre en œuvre toutes les recommandations du rapport, mais il est resté coi sur l’échéance et les engagements financiers requis (19 février).

Laisser le système de justice abandonner les femmes. La seule prison pour femmes du Québec sera bientôt fermée et les femmes seront incarcérées dans un établissement qui n’a pas été conçu pour leurs besoins spécifiques (20 février). Ayant souvenir du temps où les femmes étaient incarcérées dans des établissements pour hommes, et ayant examiné la situation présente où une telle mesure existe encore, tous les experts savent déjà qu’il s’agit d’une situation propre à l’irrespect des droits des détenues (Marjolaine Péloquin, 27 février).

Instaurer des mesures punitives à l’aide sociale. Le ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale (sic) tente d’imposer le « workfare » pour les premiers demandeurs de l’aide sociale en échange des prestations de dernier recours (Antoine Robitaille, ٥ février).

Envisager le revenu minimum garanti. Le premier ministre Couillard a demandé solennellement au nouveau ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, François Blais, d’examiner la faisabilité du RMG. Plusieurs analystes ont fait valoir que cette solution, qui paraît simple ne l’est pas. 1) L’instauration du RMG suppose une entente avec le gouvernement fédéral, ce qui n’est jamais simple on le sait. 2) Quel que soit le niveau du revenu minimum fixé, il faudra pour le financer mettre fin à pratiquement tous les services aux individus que procure encore l’État québécois (Jean-Robert Sansfaçon, 9 février). Peu d’analystes ont noté que ce faisant, notre État cesserait d’avoir de multiples occasions de contact direct avec les citoyens. L’affaiblissement de sa présence auprès d’eux entraînerait inévitablement, à terme, celui du sentiment d’appartenance des Québécois. C’est précisément pour s’attacher les citoyens que le gouvernement fédéral, depuis bientôt 90 ans, multiplie les occasions de leur verser directement toutes sortes de prestations, empiétant ainsi sans vergogne sur les compétences des provinces : pensions de vieillesse, assurance-emploi, allocations familiales, multiples crédits d’impôts, bourses d’études, et qu’il crée des programmes de stages ou d’emplois d’été pour les étudiants. Le RMG, c’est encore un moyen d’éloigner l’État québécois des Québécois.

b) Renoncer à agir dans nos champs de compétence

Refuser d’appuyer une motion exigeant le respect des lois votées par l’Assemblée nationale. Le gouvernement Couillard a négligé d’appliquer le règlement qui exige que toute construction d’un oléoduc de plus de 2 km dans une nouvelle emprise soit soumise à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement (Antoine Robitaille, 17 février). Il veut aussi limiter l’évaluation des gaz à effet de serre du pipeline Énergie Est à la seule portion québécoise. Les libéraux cèdent ainsi à la compagnie, qui refuse de se soumettre aux lois du Québec en prétendant n’avoir de compte à rendre qu’au gouvernement fédéral (12 février).

Heureusement, le BAPE riposte : il veut tenir compte aussi des émissions découlant de la production du pétrole dans l’Ouest, conformément à l’interprétation qu’il fait de la résolution adoptée par l’Assemblée nationale en novembre 2014 (11 février). La société civile riposte : des groupes d’environnementalistes ont décidé d’attaquer la compagnie en justice (18 février). L’opposition riposte : le Parti québécois a voulu faire voter une motion disant que « L’Assemblée nationale rappelle que le projet Énergie Est de TransCanada doit respecter les lois québécoises ». Le gouvernement libéral a REFUSÉ d’appuyer cette motion (18 février).

c) Céder les responsabilités de l’État québécois au secteur privé

Cesser de soutenir la persévérance scolaire. Même la Fondation Chagnon prévient le gouvernement Couillard que la philanthropie ne peut se substituer à l’État pour lutter contre le décrochage scolaire. Le gouvernement ne participe plus aux Journées de la persévérance scolaire, il s’est retiré du programme Réunir Réussir (R2), il a supprimé des « centaines de milliers de dollars » versés par les Conférences régionales des élus et les Forums jeunesse, il s’est désengagé de l’aide aux devoirs dans les écoles (11 et 12 février). Près de 60 % des fonds dédiés à la persévérance scolaire ont disparu dans les derniers mois, forçant l’arrêt de dizaines de projets efficaces (24 février)

Cesser d’assurer les traitements contre l’infertilité. Les cliniques privées et les banques découvrent tout le potentiel de ce marché et exigent que l’État québécois se désengage. Rappelons que les Desmarais, amis intimes du PLQ, ont un intérêt direct à la privatisation. Leur compagnie américaine IntegraMed offre d’endetter les couples infertiles contraints de payer pour les programmes désormais privés de procréation assistée et les dirige vers son réseau de cliniques de fertilité privées. Après des investissements publics de 16 millions $, la clinique de procréation assistée du CHUM ferme ses portes (24 février)

Instaurer la concurrence en santé. Les établissements de santé seront désormais financés en partie selon leur performance, par une rétribution à l’acte. Un projet pilote impliquant le secteur privé vient d’être lancé (24 février). Dans les pays où un tel système est en vigueur, les études ont démontré, selon les syndicats, « une sélection des soins les plus payants, la réduction des services les plus coûteux, et des congés accordés trop rapidement » (4 février). Bref, une telle diminution des services et des soins dans le réseau public qu’une partie de la population pourrait en venir à souhaiter la privatisation.

d) Céder les responsabilités de l’État québécois à Ottawa

Commercialisation de la marijuana. Dans le contexte de l’éventuelle légalisation de la marijuana, le ministre Leitao était spontanément prêt à laisser Ottawa réglementer la vente au Québec, alors qu’il s’agit d’une compétence provinciale. Le ministre a dû se dédire (12 février).

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Courage et espérance, disions-nous : deux vertus à cultiver, car rien n’est jamais joué tant que la lutte continue !

1 À moins d’indication contraire, toutes les dates font référence à l’édition du jour du journal Le Devoir (format papier). Il suffit d’entrer les mots-clés du propos pour trouver la référence exacte des articles utilisés.