Récit d’une vie citoyenne dans Ahuntsic

En décembre 2001, dans une salle de l’hôtel du Parlement à Québec, siège une commission parlementaire portant sur la réorganisation et la démocratisation des Offices municipaux d’habitation du Québec. Cette commission se tient dans le cadre des fusions municipales mises de l’avant par le gouvernement. La ministre péquiste Louise Harel1 et la députée libérale Fatima Houda-Pépin2 reconnaissent Monik Desjardins en tant que première locataire élue au Conseil exécutif de l’Office municipal d’habitation de Montréal. Monik Desjardins, citoyenne d’Ahuntsic, locataire dans une habitation à loyer modique (HLM), participe à cette commission parlementaire publique pour faire valoir la position de la Fédération des locataires d’HLM du Québec. Quelques mois plus tôt, en septembre 2001, Josée Boileau du journal Le Devoir publie un article intitulé « Un toit, une voix » où elle présente Monik comme une femme timide qui a pris sa place en tant que citoyenne au Québec.

En décembre 2001, dans une salle de l’hôtel du Parlement à Québec, siège une commission parlementaire portant sur la réorganisation et la démocratisation des Offices municipaux d’habitation du Québec. Cette commission se tient dans le cadre des fusions municipales mises de l’avant par le gouvernement. La ministre péquiste Louise Harel1 et la députée libérale Fatima Houda-Pépin2 reconnaissent Monik Desjardins en tant que première locataire élue au Conseil exécutif de l’Office municipal d’habitation de Montréal. Monik Desjardins, citoyenne d’Ahuntsic, locataire dans une habitation à loyer modique (HLM), participe à cette commission parlementaire publique pour faire valoir la position de la Fédération des locataires d’HLM du Québec. Quelques mois plus tôt, en septembre 2001, Josée Boileau du journal Le Devoir publie un article intitulé « Un toit, une voix » où elle présente Monik comme une femme timide qui a pris sa place en tant que citoyenne au Québec.

 

Que veut dire prendre une place de citoyen ? Peut-on cerner les repères d’un parcours citoyen, voire d’une forme de vie citoyenne ? Quelle forme d’organisation sociale favorise la conduite d’une telle vie ? C’est ce dont il est question dans les pages qui suivent. L’objectif de ce texte est de répondre à ces questions portant sur un parcours citoyen tout en esquissant une problématique qui recoupe la vie d’une personne et quelque chose qui la déborde en même temps. Présenter ce parcours d’une citoyenne veut dire se demander comment elle exerce sa citoyenneté et quel monde construire pour qu’une citoyenneté devienne possible. Pour aborder cette question, il faut prendre en compte l’histoire locale de même que le récit d’une vie tout en déblayant certaines dimensions anthropologiques de l’exercice de la citoyenneté. Ces dimensions sont les ressources auxquelles elle fait appel, la forme de vie qu’elle constitue et la culture politique qui la dynamise. À même ce texte, j’esquisse des pistes de réflexion pour les citoyens, enseignants, intervenants collectifs et représentants de l’État (élus et fonctionnaires) susceptibles de se pencher sur les acquis démocratiques dans Ahuntsic et au Québec.

La vie citoyenne de Monik Desjardins est un éloge à la polyvalence de la vie associative et à la valeur de l’éducation populaire. Pour illustrer les composantes de la vie citoyenne, il faut se pencher sur les déclencheurs personnels, les ressources collectives et le cheminement de cette citoyenneté. Tout en notant le parcours de cette femme attachée à son quartier, il importe de ressortir les éléments contextuels et les pistes réflexives que le récit nous donne à penser. Je n’aborderai du contexte que ce que le récit de vie a pu révéler, ce qui explique le titre « par elle-même ». D’autres écrits pourraient suivre en vue de présenter une recherche plus large, en cours depuis les premiers mois de 2017 sur le terrain de la production d’une localité.

Qui est Monique Desjardins ?

Elle naît en janvier 1937 dans Villeray à Montréal, fille d’un père chauffeur de taxi et d’une mère couturière. Son frère Serge naît en 1939. La famille déménage dans Ahuntsic en 1942 et, à partir de 1943, loue une maison des Dames du Sacré-Cœur sur le boulevard Gouin près de la rue Saint-Charles. Elle va à l’école Sainte-Marthe sur la rue Prieur en 1944 et 1945, puis étudie pendant quatre ans à l’école Sainte-Marguerite-Marie dirigée par les Sœurs Sainte-Croix, sur la rue Laverdure. Avec ses petites amies, elle joue sur le terrain du couvent des Dames du Sacré-Cœur où de jeunes filles de la bourgeoisie nationale et internationale sont éduquées.

Ses parents déménagent souvent tout en demeurant dans Ahuntsic et sur les pourtours du quartier. Elle refait sa septième année en anglais pour apprendre la langue, et après sa neuvième année étudie un an dans un collège où elle apprend en anglais les rudiments du secrétariat et de la comptabilité.

Monique travaille dans les assurances d’abord et pour des comptables par la suite, depuis la maison le plus souvent. Au début de sa vie de travail, elle prend le prénom Monik. Peu importe ses déménagements, elle revient vers les rues avoisinantes de Sophie-Barat, comme sa mère qui, quand elle se retrouve seule, y revient et est embauchée par les Dames du Sacré-Cœur comme couturière et portière. Monik la remplace à l’occasion dans la fonction de portière.

Monik se marie à Sainte-Madeleine-Sophie en 1960 et le couple s’installe sur Henri-Bourassa au coin de Péloquin. Son fils naît en 1967 et, en sortant de l’hôpital, elle va le présenter aux Dames du Sacré-Cœur. En entrevue, elle dit : « Moi, la religion, j’y croyais, j’étais pas une fanatique, mais j’étais bien dans ça. » Quelques années plus tard, elle assiste au départ des religieuses qui se dispersent au moment de la vente du couvent à la Commission scolaire de Montréal.

Au fil des ans, l’école de son enfance, Sainte-Marthe, devient la résidence Hélène-Desportes où sa mère habite jusqu’à sa mort, son école primaire sur la rue Laverdure devient le Centre communautaire de Solidarité Ahuntsic et le couvent des Dames du Sacré-Cœur devient l’école Sophie-Barat. Le monde se transforme, les institutions changent, des repères tombent et elle compose avec.

Pendant les années où son fils est d’âge scolaire, ils vivent à Laval où il fréquente l’école publique. Quand son couple se défait, elle prend son fils en charge : elle est seule à l’élever « monétairement » et le suit au plus près à l’école primaire, puis chez les cadets alors qu’il est au secondaire. Elle revient s’installer dans Ahuntsic en 1985 quand son fils va vivre avec son père à 18 ans et, en 1989, à la suggestion de son amie Colette Campagna, elle déménage dans un studio disponible aux Hirondelles ; c’est son premier logement social.

Travailleuse autonome sans sécurité sociale, elle gagne sa vie dans des boulots précaires en secrétariat et en comptabilité jusque dans la soixantaine avancée. Elle compte sur la pension de vieillesse et le supplément de revenu garanti. Depuis 2001, elle occupe un petit logement aux Habitations d’Auteuil, à quelques minutes à pied du Centre communautaire et à une dizaine de minutes de Sophie-Barat.

Comment Monik Desjardins exerce une citoyenneté ?

En 1977, son fils est à l’école primaire Paul-VI à Laval quand elle joint le comité de parents. Elle est la première parent d’élève à joindre le comité des enseignants pour « faire une liaison » entre parents et enseignants. À l’occasion d’une élection à la commission scolaire, elle aide Jean-Guy Dagenais3 à se faire élire commissaire. Quand son fils passe au secondaire et joint les cadets, elle participe au comité civil pendant les 5 années suivantes. Ses aptitudes en comptabilité et en administration affinent son regard critique. Les gens reconnaissent ses compétences et l’élisent au poste de trésorière des comités.

Monik a près de 50 ans quand elle arrête (je la cite) « de vouloir faire une carrière dans quelque chose ». Sa vie bascule. Elle est seule, revient dans Ahuntsic et entre dans le milieu communautaire. Elle utilise le mot bénévolat pour parler de sa citoyenneté, mais c’est bien de citoyenneté qu’il s’agit. Dans le quartier Ahuntsic dont elle n’a pas bougé depuis lors, elle dit avoir (je cite) « commencé à faire du bénévolat pour adultes, pour moi. Avant ça je faisais du bénévolat pour mon fils ». Elle ajoute : « Le bénévolat que j’ai fait depuis que mon fils a commencé l’école, c’est ce qui m’a aidée à passer à travers les embuches que j’ai eue dans la vie. » Elle ajoute : « ce qui m’a le plus valorisé c’est le bénévolat […]. J’en ai un plein album ». Ce sont des photos et des articles qui retracent son parcours citoyen4.

En 1986, elle joint l’organisme Monovie auquel elle participe pendant six années jusqu’à ce que l’organisme se réoriente. Les membres sont des personnes seules, divorcées, retraitées ; ces personnes jouent aux cartes, dansent et font des sorties organisées. Elle y va tous les soirs et, comme elle ne danse pas, y fait un travail (au comptoir-restaurant) pour contrer sa timidité. Un soir, Lise Thibault vient faire une conférence et lui dit de continuer à revenir, que ça va lui faire du bien5. Je cite Monik : « en étant ben gênée, j’voulais pas rester chez nous. Ça me forçait. Si je donnais mon nom fallait que j’y aille. Si j’disais quelque chose à faire, fallait que je le fasse […] C’est comme ça que j’ai réussi (à m’en sortir) ». C’est dans cet organisme qu’elle est élue une première fois membre d’un conseil d’administration dans Ahuntsic.

Au cours des décennies qui suivent (1992-2018), elle joint plusieurs organismes qu’elle décrit comme de « petits organismes […] où on réussissait à avoir un peu d’argent par le gouvernement pour pouvoir exister, pis on travaillait, […] on n’avait pas de salaire, rien. » Ce sont l’APA d’Or pour l’activité physique, l’ARA (l’Association des Retraités d’Ahuntsic dissoute en 2018) et Pré-retraite jusqu’à la fermeture de ce dernier quand Berthiaume-DuTremblay se retire. Elle apprend l’existence de ces organismes sociaux par une voisine, une amie ou encore dans le journal local. Elle va voir et devient membre si ça lui convient. Elle devient aussi membre des conseils d’administration en tant que trésorière, secrétaire et présidente. Quand on lui demande de participer sur des conseils, (je la cite) « c’est ce qui m’a revalorisée. […] Ça m’a montré que j’étais capable de le faire. Si on m’a élue, c’est qu’on avait confiance en moi […] je me suis pas élue toute seule. » Elle se mêle aussi de la logistique des sorties et des voyages : « J’avais pas beaucoup de sous. En travaillant je pouvais faire l’activité ».

Sans délaisser ces organismes, en 1989, elle joint le Comité de locataire du HLM Les Hirondelles (sur la rue Fleury) où elle vient de déménager dans un studio. Elle fait l’expérience d’un comité dynamique où elle se donne dans plusieurs activités qui vont de planter des fleurs dans le parterre à faire la fête à Pâques et à Noël. Elle explique que la première fonction de ces comités est sociale et qu’ils fonctionnement sur de petits budgets faits de sommes perçues auprès du gouvernement pour chaque locataire. Elle explique que les locataires d’HLM sont en partie propriétaires des HLM où ils habitent par le biais du loyer qu’ils payent ; ceci leur donne un droit sur la gestion des immeubles, une place dans les décisions6.

Sa vie politique se greffe sur ce premier comité de locataires quand en 1994, elle joint la Fédération des locataires de HLM du Québec créée l’année précédente. À l’époque, elle y va trois ou quatre fois par semaine. Elle a l’habitude de travailler le soir et la fin de semaine à la maison, ce qui libère le jour pour la fédération. Elle rencontre Robert Pilon7 qui l’encourage et la soutient dans son activité. La fédération est l’alliée du FRAPRU. Monik croise les membres du CLAC8 dans toutes sortes d’activités. Et surtout, elle fait son éducation au politique : elle apprend à connaître ses droits de locataire, elle fait connaître leurs droits à d’autres et elle exerce ce droit comme on va le voir. Elle apprend à délibérer, prescrire, argumenter et à pétitionner, revendiquer, manifester. Elle a 60 ans quand elle participe à une manifestation pour la première fois, ce qu’elle n’aurait jamais imaginé auparavant9.

Au cours de la décennie 1990-2000, les logements sociaux sont remis en question par les gouvernements fédéraux et provinciaux. En 1994, le programme de construction est aboli par le gouvernement fédéral. Au cours de ces années, le dépôt des budgets gouvernementaux sont des moments forts de contestation où les membres du FRAPRU et de la fédération sont très actifs : le budget est brûlé publiquement, des manifestations ont lieu à Ottawa et à Québec pour faire savoir que le logement social est un véhicule de redistribution de la richesse. Monik fait partie du mouvement social et pose des actions pour le logement social. En 1998, avec d’autres locataires porteurs d’une pétition signée par les locataires d’HLM d’Ahuntsic, elle rencontre Jean Campeau dans sa circonscription, puis à Québec10.

Voici comment André Giroux11 de la fédération décrit cet événement :

Lors de sa rencontre […], Monik agissait à titre de porte-parole des sept associations de locataires du quartier Ahuntsic, regroupant 600 ménages. Elle a remis au député une pétition de 500 noms. La pétition demandait au gouvernement de rester propriétaire des HLM plutôt que de les transférer aux municipalités, de ne pas augmenter leur loyer à 30 % de leurs revenus comme cela se faisait de plus en plus au Canada anglais, d’encourager les ménages travailleurs à bas revenus et d’adopter un règlement favorisant la participation des locataires à la gestion de leurs immeubles. Au fil des ans, les locataires obtiendront gain de cause, grâce à la pétition qui a obtenu 50 000 noms au Québec.

En octobre 2000, elle participe à la marche mondiale des femmes. L’année suivante, en marge d’une manifestation à Ottawa, elle rencontre Alfonso Gagliano12 pour présenter son argument. La même année, son fils et sa belle-fille la voient à la télévision quand, escortée par la police, elle sort de l’édifice Langevin qu’elle occupait avec d’autres locataires. En se remémorant ces moments forts, Monik montre les photos, les articles qui en parlent et fait valoir l’importance des luttes sociales au niveau des gouvernements mais aussi au plus proche de l’endroit où on vit, dans les habitations. Son expérience citoyenne se joue aussi au quotidien, dans des interpellations et des discussions avec les représentants de l’Office.

Elle a appris à connaître l’administrateur des logements sociaux, l’Office municipal d’habitation de Montréal mis sur pied en 1969, le « Saint-Office » comme elle dit. Comme n’importe quel administrateur d’immeuble, les agents de l’office sont interpelés pour des réparations, certaines urgentes. Elle connaît l’office pour en avoir été membre et même vice-présidente au conseil exécutif, poste dont elle a démissionné quand un membre du conseil s’est braqué contre une proposition issue des locataires13. Elle dénonce un mode de gestion trop arbitraire (je la cite) : « Quand ça fait son affaire, il nous dit “Vous êtes autonomes, vous vous arrangez avec vos troubles”, mais quand y veut (quelque chose), ben “y faut que vous fassiez ça comme ça” ». Les relations avec les gestionnaires, les organisatrices communautaires et les employé(e)s de l’office peuvent être tendues quand des passe-droits ou des privilèges sont accordés ou quand des priorités ne sont pas alignées en fonction des logements. Monik est connue pour son franc-parler, ce qui n’est pas du goût de tout le monde.

À partir de 1994 donc, elle a (je la cite) « beaucoup milité dans le logement social. C’est ça que je fais encore aujourd’hui », à raison de 2 jours/semaine depuis 2012, au service des 62 000 locataires d’HLM au Québec. Deux jours semaine elle se rend, encore aujourd’hui à 82 ans, aux bureaux de la Fédération près du métro Lionel-Groulx pour répondre aux appels des locataires et même du personnel de l’Office d’habitation, aux prises avec des problèmes. En 2018, lors du congrès annuel de la fédération qui regroupe 300 associations de locataires au Québec, elle a reçu un hommage comme militante de première heure. Un tel témoignage est rare et elle en parle avec émotion. Elle dit et redit que son cœur et sa tête sont « Fédération », marquant ainsi que le droit collectif prime et que les Offices d’habitation sont là pour les locataires et non le contraire.

Son activité est aussi associée à la Table de concertation Solidarité Ahuntsic14 dont elle a été membre citoyenne au début, lors de sa création en 1999. Quand le centre communautaire ouvre en 2001, elle vient de déménager aux Habitations d’Auteuil où elle habite. Rapidement, ses questions sur la gestion des finances la font remarquer dans les assemblées des membres. Elle est élue au conseil d’administration, successivement comme trésorière, vice-présidente et présidente. Durant son mandat, une innovation sociale est lancée, soit la transformation d’un ancien hôpital du boulevard Henri-Bourassa en logements sociaux, abordables et adaptés. Elle y collabore sans relâcher sur l’importance de construire des logements sociaux.

Monik raconte :

On a commencé, c’était l’hôpital Visitation. On avait eu le projet avec “Bâtir son quartier” pour faire Nicolas-Viel. […] Avec Solidarité Ahuntsic en même temps, pis avec le CLSC […]. Ça se croisait ça. C’est là que c’était ben intéressant parce que quand on a acheté l’hôpital, y’a fallu la décontaminer, on le savait pas. On a acheté l’hôpital, c’est moi qui a été signé les papiers à Notre-Dame-de-la-Merci [qui] nous vendait ça. Et là on s’est aperçu qui fallait décontaminer avant de construire. Quand on a fait des appels d’offre pour la construction, c’est moi qui ouvrais les enveloppes parce que j’étais la présidente. […] J’ai quitté [l’OBNL] quand la bâtisse est ouverte.

L’Habitation Nicolas-Viel ouvre en 2007. On lui propose d’y habiter, mais elle ne tient pas à déménager. En 2017, on oublie de l’inviter à la commémoration qui souligne un projet réussi.

Depuis 2009, Monik a joint un autre type d’association. Il faut savoir qu’en 1998, elle suit des cours en recherches généalogiques à la salle Gagnon de la Bibliothèque de Montréal. Depuis lors, elle fréquente les Archives nationales du Québec et les salles de bibliothèques où des archives sont disponibles. Après avoir fait la généalogie de ses parents, elle répond aux demandes de ses amies. Elle joint la Société d’histoire de Montréal-Nord, puis la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville, quand celle-ci est fondée. Au comité de recherche et archives, où je l’ai rencontrée au printemps 2019, elle fait la promotion d’activités de mémoire vivante. Jacques Lebleu15 réalise une vidéo où Monik transmet son savoir sur l’histoire locale d’Ahuntsic. Elle participe aussi à animer des visites guidées mettant en valeur l’histoire du quartier habité par Maurice Richard.

Au fil des heures passées avec Monik pour recueillir le récit de sa vie, la part critique de son propos ressort. Elle peut susciter la controverse et elle le sait. Or, elle ne critique pas tout et n’importe quoi. Ses commentaires recoupent l’arbitraire d’une certaine gestion, l’absence de démocratie de certaines formes d’organisation. Ses critiques visent les pratiques d’hommes et de femmes occupant des postes de contrôle depuis lesquels ils réfutent les objections en refusant la discussion pour asseoir leur domination. Elle dénonce les irrégularités engendrées par de telles pratiques au sein de l’appareil : les privilèges et passe-droits. Pourtant quand je lui demande si je devrais participer dans des conseils d’administration et des organismes sociaux, elle m’encourage à le faire sans hésiter. Et quand je lui demande : « T’as jamais regrettée d’être sur un CA ? » Elle répond du tac au tac : « Je regrettais pas, je démissionnais ». Monik a deux règles : « Fais ce que tu penses qui est le mieux » et « Sois intègre ».

En 2019, sa vie citoyenne continue. Dans les endroits où je l’ai accompagnée, des gens la reconnaissent. Elle croise André Gravel16 dans une assemblée annuelle ; ils se rappellent qu’elle a participé à son élection au poste de commissaire scolaire (la femme d’André apportait à Monik les appels à faire depuis chez elle). À la société d’histoire, on la consulte pour valider des photos anciennes du quartier ou lui demander une généalogie qu’elle s’active à extraire des archives. Dans son immeuble, elle s’occupe du biblio-mobile, façon d’assurer un accès à la bibliothèque pour les personnes qui ne se déplacent pas. Elle lit sur le Québec, des livres d’histoire, des récits, des romans. Chaque année, elle participe aux congrès de la Fédération des locataires d’HLM du Québec où elle s’investit dans des événements comme un défi des têtes rasées. Elle se déguise en clown avec son amie Colette Campagna pour aider les participants au Défi Pierre Lavoie. Elle s’objecte au rapport financier qui ne balance pas dans un comité de locataires. Timide cette femme ? Elle le dit. Pourtant, il faut dire son courage à persévérer envers et contre tout dans la vie publique du quartier.

Dans quel contexte cette citoyenneté est-elle exercée ?

Quel cadre social, institutionnel et politique, a pu favoriser ou limiter l’exercice d’une telle citoyenneté ? Quel monde a été construit au fil des années pour rendre cela soit possible ? Ces questions importent parce que l’exercice d’un droit de libre association, d’un droit de locataire et d’un droit de produire du savoir s’inscrivent dans un monde qui continue de se construire. Cet espace social intermédiaire constitué par des citoyens, des organismes sociaux, des instances gouvernementales et une table de quartier peut offrir des voies de passage vers le gouvernement. Des travaux en anthropologie sociale, tels ceux de Bariteau (2000), Schwimmer (2000), Neveu (2005) et Shore (2010), permettent de penser qu’une telle polité17 peut constituer un levier local de citoyenneté : l’éducation au politique, les voies d’entrée dans le champ politique et certaines formes de vie seraient déterminantes pour le sujet. Posons quelques repères d’un monde pour la citoyenneté.

Le premier est repérable dans la transformation de la culture politique locale entre la vie d’Irène Loiselle, la mère et la vie de Monik, sa fille. Alors que la communauté des religieuses s’inscrivait dans un appareil comprenant la paroisse et la hiérarchie ecclésiastique catholique, l’espace communautaire ouvert au cours de la décennie 1980 est configuré différemment, par l’exercice de citoyenneté des personnes qui y accèdent. L’appareil autoritaire de l’Église étant devenu non pertinent dans la vie de personnes divorcées et isolées, Monik accède à l’égalité par la prise de parole publique, par son capital culturel et par processus électif dans des positions administratives. Le poids de la religion n’est plus un argument pour demeurer à la maison, mariée. L’exercice de la citoyenneté ouvre sur la libre association dans des secteurs d’activités sociales, politiques et savantes. La possibilité est là de sortir du champ de la parenté et du champ travail, pour entrer à égalité dans un espace public18.

Un deuxième repère éclaire cet espace qui émerge à même la reconnaissance interrelationnelle. Quand elle se retrouve seule au cours des années 1950, Irène la mère se rapproche des Dames du Sacré-Cœur qu’elle connaissait pour avoir habité une de leurs maisons et vu sa fille fréquenter leur terrain pour y jouer et leur cuisine pour des collations. La mère et la fille travaillent au couvent et restent proches des religieuses après leur dispersion. Trente ans plus tard, cette option n’est plus disponible et Monik joint un organisme nouvellement formé pour les personnes seules. Il a été créé en 1979 par trois femmes (une d’elles habite le même HLM que Monik) voulant rejoindre ces personnes. Le premier réflexe de Monik est de se placer en position de service. Par la suite, elle accède à l’administration de cet organisme désigné comme « communautaire ». La mère de Monik reçoit un salaire, puis une pension des religieuses sans jamais participer aux décisions relevant de la communauté. Monik ne bénéficie d’aucun revenu dans le milieu communautaire, mais contribue à le construire par ses décisions et ses actions.

Un autre repère a à voir avec quelque chose de difficile à dire : la mise en place d’une hiérarchie entre citoyens bénévoles et salariés du communautaire, comme si l’appareil de gestion de l’intervention collective disposait des bénévoles, et comme si ces derniers pouvaient être utilisés, relégués sans conséquences19. On se demande si une hiérarchie communautaire serait en train de se constituer avec des effets qui interpellent l’anthropologue du social sans qu’il puisse trouver l’angle sous lequel l’aborder. Des indices de cette hiérarchisation se trouvent dans des réunions où les bénévoles ne sont pas invités, des décisions auxquelles ils ne participent pas, dans des événements où ils ne sont ni invités ni mentionnés, des écrits où ils n’apparaissent pas, où leurs propos ne sont pas transmis, comme si on pouvait effacer leur apport ou le minimiser, comme s’ils servaient de caution sans redistribution ni reconnaissance20.

Sur le versant encourageant de ce repère, on peut se demander si une forme-de-vie citoyenne serait en train d’émerger localement. Les travaux d’Ogien (2015) et de Jaeggi (2018) permettent de repérer une manière d’être en société, laquelle émergerait, caractérisée par un usage de l’écart (de la distance) avec certains mots, certains discours et par le temps consacré à des pratiques sociales dites citoyennes21. Des personnes participent, en étant controversées. Un ensemble de pratiques sociales s’entrecroiserait dans la vie de personnes et manifesterait l’ouverture d’espaces publics. Ce sont des pratiques d’association, d’opposition et d’innovation, individuelles et collectives. Si ces pratiques sont circonscrites dans des intelligences citoyennes, cette nouvelle forme-de-vie serait « relativement » définie : des intelligences se déploient individuellement tout en se formant collectivement (Hansotte, 2002). Or, les personnes dont il est question ne font pas l’unanimité, mais ne cherchent pas une souveraineté. Elles agissent sur le plan de pratiques sociales et pensent sur le plan d’intelligences citoyennes dans le cadre d’un pluralisme démocratique, où l’unanimité et le consensus ne sont pas des préalables. Elles se caractérisent par un franc-parler égalitaire dans l’espace public.

Pour qu’un tel sujet émerge, la « vie vivable » commence par un « dire-non à ce qui souhaite prendre part au statu quo » (Butler, 2012). Si la précarité est une condition contre laquelle luttent des intervenants collectifs et des citoyennes comme Monik, alors elles ne seraient pas seulement engagées à modifier certaines conditions de vie précaire. Le quatrième repère d’un monde pour la citoyenneté a trait à la transformation du rapport social22. Si la transformation du rapport homme/femme a pu jouer dans la vie de Monik, elle est relativement peu évoquée dans son récit. Quel rapport social est en jeu dans ce récit de vie ? On le retrouve dans l’enchevêtrement serré de relations de gouvernement et de propriété. En prenant connaissance de moyens pour faire reconnaître ses droits, sa vie prend un nouveau tournant. Monik n’a pas créé la Fédération des locataires d’HLM du Québec, mais y est venue à la première heure et, 25 années plus tard, y contribue encore en vue de démocratiser le rapport social de propriété des HLM. Un point crucial de son activité politique est dans l’argument que les locataires participent dans la propriété collective des HLM. En écoutant ce qu’elle dit, on se demande si on ne devrait pas étendre ce droit à d’autres relations propriétaire/locataire : le récit de cette vie dit que les luttes pour la reconnaissance sont une assise de la transformation du rapport social (Honneth, 2010).

En somme, constitué sur une rupture avec un monde antérieur hiérarchisé et réfractaire, le « communautaire » (au sens large d’un ensemble d’organismes sociaux) émergerait dans un vide où des personnes commencent à pratiquer une nouvelle forme-de-vie en créant des institutions ouvertes, démocratiques. La construction, la reproduction et la transformation d’un monde local pour une citoyenneté sont en cours, pas seulement ici (Appadurai, 2013). Or, à moins d’une attention à certains repères, le risque demeure de les voir se dissoudre sous certaines formes de pression. Pour l’heure, il importe de ne pas perdre de vue que l’espace dit « communautaire » serait dans une certaine mesure un espace public ouvert où les droits de savoir, de s’associer librement et construire démocratiquement de même que de revendiquer collectivement peuvent être exercés. Si de nouvelles hiérarchies menacent cet espace de l’intérieur ou si des formes de gestion le pressent depuis l’extérieur, il faut en saisir les contours et les articulations pour l’en dégager. Dans cette perspective, je propose trois pistes de réflexion.

Quelle réflexion esquisser pour une citoyenneté québécoise ?

Entre 2002 et 2006, je collaborais à des recherches en sciences sociales sur les travailleurs de 45 ans et plus, les relations entre des personnes d’âges différents et les compétences des jeunes de la rue. Ces enquêtes ont en partie été réalisées dans des organismes d’Ahuntsic et Cartierville. J’y ai recueilli le récit de personnes en situation de précarité qui souhaitaient faire société et revendiquer, sans qu’elles soient interpelées en ce sens dans les organismes sociaux qu’elles fréquentaient. Au terme du récit de Monik recueilli au cours des derniers six mois, le problème soulevé alors revient me hanter : il interroge l’intervention collective locale pratiquée dans les organismes communautaires et gouvernementaux. La question est : dans quelle mesure l’intervention soutient l’action sociale, politique et cognitive des citoyens et contribue à une forme-de-vie citoyenne ? Ou, à l’inverse, dans quelle mesure l’intervention produirait de l’indifférence politique, de sorte que des gens se détournent de l’action, se replient sur soi et optent pour l’isolement ?

Le parcours de Monik Desjardins est exemplaire d’une vie citoyenne qui éclot en moitié de vie et se déploie jusqu’à 80 ans passés. Il ne s’agit pas de faire de cette vie un exemple à suivre, elle est unique. Il ne s’agit pas d’individualiser ce parcours, d’en faire une exception : il est engoncé dans une société et une localité dont il faut aussi rendre compte. Mon apport vise à comprendre la citoyenneté de ce sujet femme et le monde construit pour garantir ses conditions de possibilité. S’il est vrai de dire que des institutions démocratiques sont installées pour que des gens participent, en votant par exemple, il faut aussi se pencher sur les institutions au plus près des gens pour saisir leur vie citoyenne, ces organismes aux caractères les plus divers qui se sont installés dans un quartier au fil des ans et qui ont été créés en partie par des gens du quartier. C’est localement qu’il faut saisir la base citoyenne et la « polité » qu’elle met en place : comment comprendre la vie et la mort des organismes, ce qui les transforme ? Certes, l’histoire de ce que Monik a soutenu et de ce qui l’a soutenue en retour s’écrit encore, mais comment assurer que des formes de discrimination et de hiérarchisation ne minent pas ces acquis ?

Penser la citoyenneté veut dire faire un pas de côté pour voir de quoi elle est faite et comment elle émerge (au niveau très local du demos si je puis dire, de la localité). En soulignant le parcours citoyen de Monik, réfléchissons sur les commencements politiques, ces moments d’opposition, d’innovation et de décision du faire société, des moments non réductibles aux pratiques gestionnaires. En même temps, on ne naît pas citoyen, pas plus qu’on ne parle une langue en naissant. L’exercice de la citoyenneté est affaire collective autant qu’individuelle : ça s’apprend comme on apprend une langue, cette ressource symbolique qui établit notre rapport au monde, aux autres et à soi. Monik dit cela quand elle affirme qu’elle ne s’est pas élue toute seule et que la reconnaissance des autres génère la sienne qui retourne aux autres. Ou encore quand elle fait valoir l’éducation politique qu’elle a reçue à la Fédération des locataires d’HLM et qu’elle donne en retour à d’autres locataires en répondant à leurs appels. Ça s’apprend et ça prend du temps : elle aménage le temps de sa vie en fonction du temps de citoyenneté. En définitive, comment accompagner et déployer une forme-de-vie citoyenne au Québec ?

 

 

 

Références bibliographiques et méthodologiques

Le récit de vie de Monik Desjardins prend appui sur le verbatim dactylographié mot à mot de 6 heures d’entretiens enregistrés suivis de 4 conversations (15 à 20 minutes) pour vérifier les concordances de dates, lieux et noms.

Sur le plan de la méthode, la principale ressource est :

Beaud, Stéphane, 1996, « L’usage de l’entretien en sciences sociales. Plaidoyer pour l’“entretien ethnographique” » dans Politix 35 : 226-257

Deux articles ont aidé à éclairer cette forme-de-vie citoyenne :

Beaudet, Pierre et Mathilde Grandgonnet, 2018, « Manon Massé : la politique par en bas » dans Nouveaux Cahiers du socialisme 20 : 113-118

Saillant, François, 2018, « Le FRAPRU : quarante ans de luttes face à l’État » dans Nouveaux Cahiers du socialisme 20 : 128-138

Au fil de ce travail, des lectures permettent de proposer des repères contextuels et pistes réflexives :

Appadurai, Arjun, 2013, Condition de l’homme global, Paris, Payot

Bariteau, Claude, 2000, « La citoyenneté québécoise en devenir : des pratiques vers un projet » : 135-141 dans Yves Boisvert, Jacques Hamel et Marc Molgat (dir.) Vivre la citoyenneté. Identité, appartenance et participation, Montréal, Liber

Bulter, Judith, 2012, « Une morale pour temps précaires » dans Le Monde, 29 septembre 2012 (discours de réception du prix Adorno)

Comeau, Yvan, Denis Bourque et René Lachapelle, 2018, L’intervention collective. Convergences, transformations et enjeux, Québec, Presses de l’Université du Québec

Hansotte, Majo, 2002, Les intelligences citoyennes. Comment se prend et s’invente la parole collective, Bruxelles, De Boeck Université

Honneth, Axel, 2010, « Le motif de tout conflit est une attente de reconnaissance » dans Revue Mouvements, Pensées critiques : 171-182 (entretien)

Jaeggi, Rahel, 2015, « Towards an immanent critique of forms of life » dans Raisons politiques 57 : 13-29 (préfigure son livre Critique of Forms of Life)

Neveu, Catherine, 2005, Anthropologie de la citoyenneté, Volume 2, Thèse d’habilitation, Document synthèse, Université de Provence

Ogien, Albert, 2015, « La démocratie comme revendication et comme forme de vie » dans Raisons politiques 57 : 31-47

Schwimmer, Éric, 2000, « Construire un monde pour la citoyenneté » : 305-317 dans Michel Pagé et al. (dir.) L’éducation à la citoyenneté, Sherbrooke, Éditions du CRP

Shore, Cris, 2010, “Locating the Work of Policy”: 211-224 dans Colebatch Hal K. et al (dir.), Working for Policy, Amsterdam University Press

Remerciements

Mes remerciements les plus chaleureux et les plus sincères vont à Monik Desjardins qui m’a fait confiance. Elle a pris tout ce temps pour partager l’histoire de sa vie et ouvrir grand ses archives. J’ajoute que son souci du détail a été précieux et qu’elle est demeurée très disponible tout au long de l’exercice.

Des échanges réguliers avec l’anthropologue David Aubé sur nos recherches respectives permettent de garder le cap. Des discussions sur le communautaire dans Ahuntsic ont lieu au sein du collectif autonome formé avec Bernard Gauvin et Marcel Pinard.

Je remercie David Aubé et Louise Sarda pour leurs commentaires et questionnements sur une première version de cet article.


1 Louise Harel est une femme politique québécoise. Elle a été députée à l’Assemblée nationale, présidente de cette Assemblée, chef de l’opposition et chef de son parti par intérim, plusieurs fois ministre. Elle était ministre des affaires municipales de 1998 à 2002.

2 Fatima Houda-Pepin est une femme politique et une politologue québécoise. Elle a été députée de la circonscription de La Pinière à l » Assemblée nationale entre 1994 et 2014.

3 Jean-Guy Dagenais, propriétaire de commerce, a été élu à la Commission scolaire des Mille-îles.

4 La figure de bénévole traverse le communautaire de part en part et distingue des personnes non-salariées qui joignent les organismes pour participer aux actions (et aux décisions) collectives. Le bénévolat renvoie à l’exercice d’une citoyenneté qui, à même la vie associative locale, fait société.

5 Lise Thibault est animatrice de télévision et femme politique québécoise. Elle a été lieutenante-gouverneure du Québec de janvier 1997 à juin 2007, première femme à occuper ce poste.

6 Le coût annuel des HLM au Québec est d’approximativement 500 M$ dont 42 % sont payés par les locataires, 29 % par le gouvernement fédéral, 23 % par le gouvernement provincial et 6 % par les municipalités. Ce point revient souvent dans les propos de Monik.

7 Robert Pilon est, depuis 26 ans, coordonnateur de la FLHLMQ. Il était au Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) quand il a cofondé la Fédération.

8 Le Comité Logement Ahuntsic-Cartierville œuvre depuis 1988 pour la défense des droits des locataires et l’amélioration des conditions de logement.

9 À la FLHLMQ, Monik a été membre du Conseil des locataires de Montréal, membre et secrétaire du conseil d’administration et déléguée de la fédération au FRAPRU.

10 Jean Campeau a été, au cours des années 1980, président-directeur-général de la Caisse de dépôt et placement du Québec. En 1990-1991, il a été coprésident de la Commission sur l’avenir politique et constitutionnel du Québec (commission Bélanger-Campeau). Il a été député péquiste de la circonscription de Crémazie entre 1994 à 1998, période au cours de laquelle il a été ministre des Finances, ministre du Revenu et ministre des Transports.

11 André Giroux est un des trois membres bénévoles à la FLHLMQ.

12 Alfonso Gagliano a été élu député de 1984 à 2002 et a siégé à la Chambre des communes à Ottawa. Il a été ministre du Travail et ministre responsable d’organismes parapublics.

13 À l’OMHM, Monik a fait partie du Comité de relation avec les clientèles, membre du comité d’Audit et du comité d’évaluation de l’entretien des immeubles, représentante des locataires et vice-présidente du comité exécutif.

14 Une Table de concertation rapproche un ensemble d’acteurs (communautaires, institutionnels, politiques, privés et citoyens) d’un quartier pour travailler collectivement sur des cibles concrètes de développement social local.

15 Jacques Lebleu est coordonnateur du comité recherche et membre du conseil d’administration de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville. Il coordonne l’édition du Bulletin. Il est aussi membre actif de Mobilisation Environnement Ahuntsic-Cartierville.

16 André Gravel a participé au projet des Habitations Nicolas-Viel, a été Président de son conseil d’administration et en est toujours membre. Il a été président de Solidarité Ahuntsic de 2015 à 2019. Il participe aux activités du comité recherche de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville.

17 La polité réfère à un système plus ou moins formel de gouvernement local, ce qui je pense convient à la situation d’une Table de concertation (de quartier) avec les organismes sociaux, instances gouvernementales et citoyens qui s’y rattachent en Assemblée.

18 N’importe quel lieu convivial où la parole individuelle et collective s’invente et se noue est un espace public. Dans ces lieux, la société civile a prise sur elle-même en auto-instituant des moyens démocratiques.

19 L’intervention collective est une profession émergente étudiée au Québec par Comeau et al. (2018). Elle est exercée dans des organismes communautaires et instances gouvernementales.

20 Pour qu’il y ait reconnaissance politico-symbolique (et non idéologique), les situations d’injustice, indignité et inégalité doivent se traduire en réaménagements dans les rapports sociaux.

21 La forme de vie est un nœud de pratiques sociales interconnectées, d’orientations convenues et d’ordonnancements sociaux qui touchent une conduite de vie personnelle et collective ; sans être absolument contraignantes, ces pratiques se constituent normativement, elles sont donc réglées. Une forme de vie se met en place pour remédier à des conditions problématiques auxquelles des gens font face.

22 Un rapport social est repérable quand, dans une situation relationnelle continue, il y a une division de structure (par exemple entre enseignent et étudiant ou propriétaire et locataire), principe (de hiérarchisation ou d’égalisation) et encadrement (comme dans une forme institutionnalisée).

* Anthropologue, l’auteur est secrétaire du conseil d’administration de Solidarité-Ahuntsic (Table de quartier) et membre du Comité recherche de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville.

** Le quartier Ahuntsic (population de 74 000 personnes dont 21 % vit sous le seuil de pauvreté) fait partie de l’Arrondissement Ahuntsic-Cartierville de la Ville de Montréal.

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