Jalons pour la lutte idéologique au Québec

Vous tournez à gauche sur la rue Châteauguay. Puis vous bifurquez sur la rue Monseigneur-Plessis et arrivez rapidement à votre école. Pendant des années, matin, midi et soir, vous parcourez ces rues sans savoir ce qui se cache sous les noms qui les désignent. Plus tard, vous le saurez. Vous apprendrez quel rôle ont joué certains de ceux qu’on appelait autrefois des « Canadiens », c’est-à-dire les descendants des Français établis dans la vallée du Saint-Laurent. « Châteauguay » célèbre une victoire remportée par des miliciens canadiens lors d’une guerre menée par leurs maîtres britanniques, tandis que la rue Monseigneur-Plessis est ainsi nommée en l’honneur de cet évêque de Québec qui soutenait le pouvoir en place à la même époque (Lacoursière 1997 : 158-162). Ces miliciens et cet évêque méritent-ils vraiment que nous leur rendions hommage ? Ceux qui ont toute autorité sur la toponymie le croient. Quant aux passants, voient-ils dans ces noms de rue autre chose qu’une manière commode de s’orienter ?

La toponymie n’est pas le seul moyen que les dirigeants politiques utilisent pour rendre hommage à ceux dont l’action doit servir d’exemple pour leurs concitoyens. Au cœur de nos villes, les monuments commémoratifs sont encore plus puissants de ce point de vue (Gaudreault 2010a et 2013). Dans le cadre de la lutte idéologique qui accompagne leur mouvement de libération nationale, les indépendantistes québécois ont tout intérêt à actionner ce puissant levier que constitue le combat contre la toponymie et les monuments commémoratifs au service de l’idéologie régnante.

Vous tournez à gauche sur la rue Châteauguay. Puis vous bifurquez sur la rue Monseigneur-Plessis et arrivez rapidement à votre école. Pendant des années, matin, midi et soir, vous parcourez ces rues sans savoir ce qui se cache sous les noms qui les désignent. Plus tard, vous le saurez. Vous apprendrez quel rôle ont joué certains de ceux qu’on appelait autrefois des « Canadiens », c’est-à-dire les descendants des Français établis dans la vallée du Saint-Laurent. « Châteauguay » célèbre une victoire remportée par des miliciens canadiens lors d’une guerre menée par leurs maîtres britanniques, tandis que la rue Monseigneur-Plessis est ainsi nommée en l’honneur de cet évêque de Québec qui soutenait le pouvoir en place à la même époque (Lacoursière 1997 : 158-162). Ces miliciens et cet évêque méritent-ils vraiment que nous leur rendions hommage ? Ceux qui ont toute autorité sur la toponymie le croient. Quant aux passants, voient-ils dans ces noms de rue autre chose qu’une manière commode de s’orienter ?

La toponymie n’est pas le seul moyen que les dirigeants politiques utilisent pour rendre hommage à ceux dont l’action doit servir d’exemple pour leurs concitoyens. Au cœur de nos villes, les monuments commémoratifs sont encore plus puissants de ce point de vue (Gaudreault 2010a et 2013). Dans le cadre de la lutte idéologique qui accompagne leur mouvement de libération nationale, les indépendantistes québécois ont tout intérêt à actionner ce puissant levier que constitue le combat contre la toponymie et les monuments commémoratifs au service de l’idéologie régnante.

Nous allons d’abord exposer les fondements théoriques de la lutte idéologique, décrire ensuite la situation particulière du Québec au sein de la pseudoconfédération appelée Canada et, enfin, examiner les différents aspects d’une campagne possible de commémoration libératrice à partir de luttes éparses menées depuis quelque temps dans la région du Saguenay.

1. Fondements théoriques de la lutte idéologique

Commençons par quelques propositions générales que nous expliciterons par la suite dans cette première partie. Tout sujet agit dans le but de satisfaire ses besoins fondamentaux. Une conscience claire de son état et de son milieu l’aide à décider des moyens à utiliser et des obstacles à éliminer pour arriver à ses fins. L’idéologie résulte de la jonction opérée par un sujet collectif politique (mouvement, parti, État) entre une prise de conscience et une prise de décision. La lutte idéologique est la lutte menée pour transformer la conscience et les décisions d’un sujet collectif politique. Elle peut conduire à l’effondrement total de l’idéologie d’un État, par exemple, et au remplacement du régime politique. La toponymie et l’art public comptent parmi les moyens d’expression privilégiés de l’idéologie d’un État. La relégation dans un musée des œuvres d’art qui expriment une idéologie contestée peut servir à l’éducation des nouvelles générations de citoyens.

Besoins du sujet et valeur de l’action

Un sujet agit pour satisfaire deux besoins permanents : d’abord, un besoin de conservation ou d’entretien de la vie ; ensuite, un besoin de protection contre des forces naturelles nuisibles ou des sujets hostiles[1]. Comme on le voit par l’utilisation des mots « nuisibles » et « hostiles », la définition du besoin est associée de façon étroite à celle de la valeur. Une action peut en effet prendre quatre valeurs différentes du point de vue de la satisfaction des besoins d’un sujet. Pour un sujet donné, une action a une valeur positive si elle favorise la satisfaction des besoins de ce sujet, une valeur négative si elle la contrarie, une valeur non positive si elle ne la favorise pas et, enfin, une valeur non négative si elle ne la contrarie pas. La distinction entre valeur positive et valeur négative recouvre notamment les distinctions courantes entre allié et ennemi ou entre collaborateur et résistant. Si nous reprenons les exemples précédents, la distinction entre valeur non positive et valeur non négative recouvre celle entre le non-allié et le non-ennemi ou entre le non-collaborateur et le non-résistant. Soulignons enfin que la valeur d’une action est toujours relative à un sujet donné et peut également varier dans le temps pour ce même sujet.

Pour assurer sa conservation, un sujet collectif politique comme l’État prend diverses mesures économiques. Pour assurer sa protection contre des États ennemis potentiels, un État maintient en permanence une force armée et compte parfois sur le secours d’États alliés. Lorsqu’un État est vaincu par un État ennemi et que son territoire est occupé par la force armée de cet État, il peut se développer en son sein quatre types de comportements politiques correspondant aux quatre valeurs énumérées dans le paragraphe précédent : 1) la collaboration avec l’agresseur ; 2) la résistance à l’agresseur ; 3) la non-collaboration avec l’agresseur ; 4) la non-résistance à l’agresseur (Gaudreault 2010b). Autrement dit, ces quatre comportements ont une valeur positive, négative, non positive et non négative du point de vue de l’agresseur.

Processus et organes de satisfaction des besoins du sujet individuel

La commande, l’exécution et l’information constituent les trois étapes du processus de satisfaction des besoins du sujet. Ces étapes se répètent jusqu’à ce que le besoin soit satisfait exactement, ni trop ni trop peu. Tout excès ou manque est corrigé par une nouvelle commande jusqu’à la stabilisation complète du processus appelé « feedback » (rétroaction) par Wiener (1970 [1950 et 1954]). Chez le sujet humain individuel, le processus est mis en action par trois types d’organes correspondant aux trois étapes définies précédemment : le cerveau traite l’information et commande, les muscles exécutent la commande et les organes sensoriels transmettent l’information au cerveau, qui la stocke dans sa mémoire pour usage immédiat ou ultérieur.

Dans le processus de satisfaction des besoins, l’information, ou prise de conscience, occupe une position charnière. Consécutive à l’exécution de la tâche commandée, elle prépare la nouvelle commande ou, autrement dit, la prise de décision. Pour compléter la pensée de Wiener, nous nous inspirerons de l’antique distinction entre le vrai et le bien et poserons que l’information comporte, en premier lieu, un jugement sur la réalité de l’action perçue par les sens et, en second lieu, un jugement sur la valeur de cette action. Les jugements de réalité et de valeur peuvent être inexacts, ce qui entraîne une mauvaise prise de décision. Ces erreurs de jugement sont dues au sujet lui-même ou à d’autres sujets qui, de façon délibérée ou non, communiquent au premier des jugements faux.

Aucune manifestation physique n’accompagne le jugement de réalité chez un sujet, mais cela peut être le cas pour le jugement de valeur, qui sort de l’enceinte du cerveau et prend la forme de ce qu’on appelle les « émotions » : par exemple, peur d’une action future de valeur négative, espoir d’une action future de valeur positive, joie à la suite d’une action de valeur positive, tristesse à la suite d’une action de valeur négative. Lorsqu’une action de valeur positive pour un sujet est due à un second sujet, le premier exprime sa gratitude à ce second sujet. S’il s’agit d’une action de valeur négative, le sujet manifeste son jugement de valeur sous la forme de la colère.

Il arrive que le sujet se trompe sur la valeur réelle d’une action pour lui-même. Aux yeux de ceux qui connaissent la vraie valeur de cette action pour le sujet, celui-ci exprime alors des émotions paradoxales, qui heurtent le bon sens des observateurs : gratitude envers un malfaiteur, colère envers un bienfaiteur, si nous reprenons nos deux derniers types d’émotions. Par ailleurs, il arrive que, sous le coup d’une émotion intense, par exemple une peur extrême, un sujet soit incapable de trouver une solution à son problème et de prendre une décision. Par conséquent, le redressement des erreurs de jugement et la maîtrise des émotions sont des facteurs essentiels à la réussite du processus de satisfaction des besoins.

Sujet collectif politique

Un sujet collectif n’est ni un ensemble de sujets individuels réunis par hasard en un lieu ni une classe de sujets individuels étiquetée par un observateur à partir de la constatation de caractéristiques communes. Nous définissons plutôt un sujet collectif comme un ensemble de sujets humains individuels qui, dans le but de satisfaire leurs besoins propres de conservation et de protection, s’engagent volontairement à se répartir les fonctions de commande, d’exécution et d’information que chacun aurait à exercer au complet en l’absence de cette division du travail.

Un État démocratique est un sujet collectif qui répond à la définition ci-dessus. Soutenu par des sujets individuels réunis par une convention initiale, le gouvernement s’occupe de la première fonction, la commande. À l’autre bout du processus de satisfaction des besoins, les tribunaux, entre autres, s’occupent de la fonction d’information qui, rappelons-le, comprend la production de jugements de réalité et de jugements de valeur. Quant à la fonction centrale, l’exécution, elle se divise en deux sous-fonctions spécialisées. La police et l’armée assurent la protection contre des actions hostiles intérieures ou extérieures, tandis que la fonction de conservation relève de sujets collectifs auxiliaires variés, notamment les sociétés agricoles, industrielles et commerciales.

Par la violence, la menace de violence ou le mensonge, un État peut assujettir un autre État et utiliser celui-ci pour la satisfaction de ses besoins propres. Tout État assujetti et contraint de collaborer avec l’État conquérant ne peut être considéré comme un allié de celui-ci, car, exactement comme dans un contrat entre sujets individuels[2], un traité d’alliance véritable suppose que les deux partenaires sont libres de l’accepter ou de le refuser, c’est-à-dire qu’aucun des deux n’exerce de contrainte sur l’autre. En outre, une « confédération » d’États qui réunirait non des États souverains, mais un État conquérant et un État assujetti n’aurait aucune légitimité, car cette pseudoassociation résulterait aussi de la contrainte.

Idéologie

Le mensonge compte parmi les moyens utilisés par l’État conquérant pour maintenir un État conquis dans l’assujettissement. L’État conquérant ment aussi bien à propos de lui-même qu’à propos de l’État assujetti :

Comment l’usurpation peut-elle essayer de passer pour légitimité ? Deux démarches sont possibles : démontrer les mérites éminents de l’usurpateur, si éminents qu’ils appellent une telle récompense ; ou insister sur les démérites de l’usurpé, si profonds qu’ils ne peuvent que susciter une telle disgrâce. Et ces deux efforts sont en fait inséparables (Memmi 1985 [1957] : 77).

La glorification de l’État conquérant et le dénigrement de l’État conquis sont des jugements de valeur qui, bien intégrés par tous, maintiennent à la fois la bonne conscience des vainqueurs et la mauvaise conscience des vaincus.

Lorsqu’ils sont énoncés par un État ou par un mouvement ou parti politique, les jugements de valeur comme ceux mentionnés ci-dessus entrent dans la constitution de ce qu’on appelle une « idéologie ». Voici d’abord ce que dit à propos de l’idéologie un sociologue québécois qui a longuement étudié celles qui ont eu cours au Québec :

L’idéologie est une définition explicite de la situation par les groupements, les classes surtout, qui y sont engagés ; l’histoire des idées ne peut donc être reconstituée isolément. Non pas que les idéologies soient un quelconque reflet de la structure sociale. Elles en comblent plutôt les indéterminations, elles donnent cohérence, elles fixent des objectifs d’action (Dumont 1971 : 1).

Dans cette conception, une idéologie émane d’une classe sociale (« surtout », précise Dumont) et comprend une définition de la situation et des objectifs d’action. Selon une autre conception, l’idéologie peut reposer sur une mystification et émaner non seulement d’une classe dirigeante ou d’une classe dirigée, mais aussi d’un peuple conquérant ou conquis (Memmi 1985 [1957] : 108). En tenant compte des deux conceptions qui précèdent et de l’approche adoptée jusqu’ici, nous définissons l’idéologie comme un ensemble d’énoncés, vrais ou faux, qu’émet un sujet collectif politique (État, mouvement politique ou parti politique) et qui comprend, d’une part, des jugements de réalité et des jugements de valeur (étape de l’information dans le processus de satisfaction des besoins) et, d’autre part, des objectifs d’action (étape de la commande dans le même processus). Signalons que cette définition précise la source d’une idéologie : ce n’est ni un peuple, mais un État, ni une classe sociale, mais un mouvement politique ou un parti politique.

Effondrement d’une idéologie

Un bon exemple de mystification idéologique nous est fourni par les pays baltes avant la dissolution en 1991 de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). En 1939, Staline et Hitler ont conclu un pacte de non-agression, dit « pacte Molotov-Ribbentrop ». Dans des protocoles secrets, l’Union soviétique et l’Allemagne se répartissaient les États de l’Europe centrale. En particulier, les États baltes – Estonie, Lettonie et Lituanie – devaient tomber sous la domination de l’Union soviétique. En 1988, des Estoniens publient le texte des protocoles secrets. La condamnation du pacte est rapidement unanime dans les trois États baltes. La mythologie de l’historiographie staliniste venait de s’effondrer (Senn 1990 : 135). Jusque-là, on enseignait partout que les Lituaniens, les Estoniens et les Lettons avaient effectué une révolution socialiste indépendante de l’influence de Moscou et avaient demandé volontairement à faire partie de l’Union soviétique (Senn 1990 : 51). En 1988, les Baltes venaient tous de prendre conscience que leurs pays respectifs avaient été annexés. Bien que la faillite économique du régime soviétique ait été un facteur important de la marche des pays baltes vers l’indépendance (réalisée en 1991), « le facteur essentiel a été naturellement la publication de la vérité à propos du pacte Molotov-Ribbentrop et de la façon dont les Baltes ont été annexés en 1940[3] » (Lieven 1993 : 222 ; notre traduction).

Manifestation de l’idéologie de l’État dans l’espace public

Les manuels d’histoire officiels, c’est-à-dire autorisés par l’État et diffusés dans les écoles publiques, contiennent des jugements de réalité et des jugements de valeur sur l’histoire du pays. L’information ainsi véhiculée sert à justifier les objectifs de l’État auprès des nouvelles générations. Toutefois, pour la diffusion de son idéologie auprès de l’ensemble de la population, l’État dispose d’autres moyens puissants : la commémoration permanente par les monuments publics et la toponymie, et la commémoration périodique par les fêtes officielles (fête nationale et autres jours fériés), sans compter les médias sur lesquels il a toute autorité.

Les monuments commémoratifs, ainsi qu’un grand nombre de noms de lieux, ont pour but de rendre hommage à des personnalités dont l’action passée a une valeur positive exemplaire du point de vue d’un régime politique donné. Si le régime change, la valeur attribuée aux personnalités honorées par l’ancien régime change elle aussi. Il s’ensuit des transformations profondes dans la toponymie et dans l’ensemble des monuments commémoratifs publics.

Que faire avec les signes d’une idéologie contestée ?

Durant la Révolution française, le peuple a détruit un grand nombre de monuments publics célébrant la monarchie. Cependant, des chefs de la Révolution ont résolu de sauver certaines œuvres d’art public en transformant leur valeur par le recours à un moyen inédit, le musée :

La dimension politique et esthétique du musée est alors clairement posée : elle permet la préservation de l’objet d’art en le situant dans un lieu appelé à neutraliser son symbole politique, son appartenance à un monde détruit (Héritier 2003 : 46).

Toutefois, l’œuvre enfermée dans un musée et dépouillée de sa valeur politique ancienne n’a pas seulement une valeur esthétique positive. Elle acquiert une valeur politique nouvelle :

La Révolution est défendue, justifiée, légitimée par les œuvres, enfermées dans le patrimoine permettant une pédagogie du contre-exemple. La société d’Ancien Régime est rendue présente pour être jugée. (Héritier 2003 : 83).

Nous voyons par cet exemple comment un objet de valeur négative – du point de vue des révolutionnaires – acquiert aux yeux de ceux-ci une valeur positive : par le retrait de l’espace public et l’introduction dans un lieu de transformation de la valeur. Le musée devient ainsi l’équivalent d’un tribunal où l’arme que l’on brandit servira à faire condamner le coupable et où, enfin, la justice prévaudra.

L’enfermement dans un musée est une bonne solution pour les monuments commémoratifs condamnés, mais aptes à servir à l’éducation populaire future. Quant aux noms de lieux qui honorent des personnages honnis par les contestataires, on leur réserve un autre sort, soit l’oubli, soit une condamnation exprimée dans les pages d’un manuel d’histoire. Revenons brièvement à l’exemple de l’effondrement d’une idéologie cité plus haut. À Vilnius, en Lituanie, les nouvelles autorités municipales ont simplement redonné leur ancien nom aux rues qui célébraient jusque-là les héros de la période soviétique (Senn 1990 : 37).

Avant de passer à un exposé sommaire de la situation du Québec à l’intérieur du Canada, résumons les fondements théoriques ci-dessus. L’idéologie est un ensemble d’énoncés, vrais ou faux, qu’émet un sujet collectif politique (État, mouvement politique ou parti politique) et qui comprend, d’une part, des jugements de réalité et des jugements de valeur et, d’autre part, des objectifs d’action. La production d’une idéologie se fait en deux temps. D’abord, le sujet collectif politique prend conscience de sa situation et se demande si ses besoins de conservation ou de protection sont satisfaits (jugements de réalité et de valeur). Ensuite, il prend une décision : maintenir un statu quo qui le satisfait ou modifier la situation en utilisant tel ou tel moyen. Il arrive qu’une idéologie s’effondre en raison d’une inadéquation totale avec le réel.

2. Situation du Québec à l’intérieur du Canada

État fédéral créé par une loi adoptée à Londres en 1867, le Canada s’est émancipé progressivement de la tutelle de l’État britannique jusqu’à atteindre une indépendance complète en 1982, date à laquelle il devenait entièrement responsable de son destin, y compris de sa propre constitution politique. Dans ce pays, tous les citoyens sont, en principe, égaux devant la loi et considèrent qu’ils vivent dans une démocratie, malgré le fait qu’il y subsiste quelques symboles de la monarchie britannique.

La Confédération canadienne est née par suite d’une initiative, non pas du parlement britannique, mais des colonies anglaises qui deviendront plus tard les « provinces » du nouveau « Dominion of Canada », pays membre de l’Empire britannique. En 1864, à Québec, une conférence réunit 33 délégués, dont quatre Canadiens français de la future province de Québec. Ceux qu’on appellera les « Pères de la Confédération » mettent au point l’essentiel de la future constitution du Canada. Les propositions de la conférence de Québec sont finalement endossées par trois colonies : 1) le Canada-Uni, constitué de la section du Haut-Canada (Ontario actuel) et de la section du Bas-Canada (Québec actuel), 2) le Nouveau-Brunswick et 3) la Nouvelle-Écosse. Au Canada-Uni, 91 députés appuient les propositions et 33 les rejettent. Le décompte selon l’origine nationale montre que, dans l’assemblée du parlement du Canada-Uni, la majorité des députés canadiens-français sont en faveur de la création d’une confédération (Bernard 1971 : 265). Plus tard, Henri Bourassa, célèbre député et journaliste canadien-français, parlera de la « libre et volontaire association de deux peuples » en parlant de la « nation canadienne » réunie dans la Confédération (Drolet 1974 : 233-234).

Le Québec aurait-il en vérité librement adhéré à la Confédération canadienne ? La réponse est catégorique : non. En effet, les descendants des colons français et leurs alliés par mariage ou par intérêt qui formaient alors la majorité de la population de la future province de Québec, née avec la création de la Confédération en 1867, n’étaient pas constitués en État indépendant. Leur opinion ne pouvait s’exprimer que par l’intermédiaire des partis politiques autorisés par le pouvoir colonial britannique. Seule une colonie britannique dûment constituée en sujet collectif politique comme le Canada-Uni pouvait adhérer à la confédération projetée.

Le Canada est, dit-on, une démocratie. Cependant, cette démocratie n’existe pas pour les descendants des Français et leurs alliés au Québec, du moins pour ceux qui résistent depuis toujours. Derrière le mot-écran de « démocratie » se profile en réalité une situation d’assujettissement, ce que savent bien tous les indépendantistes québécois. En face d’eux se dresse la foule des collaborateurs locaux de l’État canadien, héritier du Conquérant britannique. Ces collaborateurs indigènes favorisent l’option de la décentralisation plutôt que celle de la centralisation du pouvoir canadien :

L’évolution résolument centralisatrice de la fédération canadienne accomplie par la Cour suprême par sa jurisprudence fédérative constitue une réelle menace, à moyen et à long terme, à la survie et à l’épanouissement de l’identité culturelle des Québécois (Brouillet 2005 : 381).

On appelle parfois « autonomisme » ce courant idéologique qui vise une « affirmation de l’identité québécoise à l’intérieur d’un cadre plus vaste » (Balthazar 2013 : 309). Les autonomistes sont encore appelés des « nationalistes partisans d’un fédéralisme renouvelé » (Balthazar 2013 : 212).

Dans la terminologie de Rings (1981), qui a analysé le comportement des populations dans les pays occupés par les Allemands durant la Deuxième Guerre mondiale, l’autonomisme serait l’idéologie des partisans d’une « collaboration conditionnelle » avec l’État agresseur. Les partis politiques québécois qui prônent actuellement une collaboration conditionnelle avec l’État fédéral se disent habituellement eux-mêmes « fédéralistes ». Étant donné que, dans le contexte canadien, « fédéralisme » est un mot-écran du même genre que « démocratie », nous ferons appel à un mot déjà utilisé en France pour désigner la collaboration de la France avec l’Allemagne sous le maréchal Pétain, entre 1940 et 1944 (Hoffmann 1974 ; Paxton 1997 [1973] ; Rousso 1987), et appellerons cette idéologie le « collaborationnisme[4] ». C’est l’idéologie non seulement des partis politiques dits « fédéralistes » ou « autonomistes », mais aussi de l’État québécois lui-même, ainsi que de ses créatures, les municipalités. Comme nous l’avons montré ailleurs (Gaudreault 2010a et 2013), l’art public est perverti par les hommages paradoxaux des vaincus à leurs vainqueurs, signe d’une volonté persistante de collaboration avec le pouvoir canadien, héritier du Conquérant britannique.

3. Une commémoration libératrice au Saguenay

La toponymie et les monuments commémoratifs de la région du Saguenay illustrent le collaborationnisme des pouvoirs locaux. Cependant, il arrive qu’une certaine résistance se manifeste. Nous allons examiner l’histoire récente des villes de cette région pour montrer les difficultés de la lutte contre l’idéologie régnante.

En 1975, les villes de Jonquière, de Kénogami et d’Arvida ont été fusionnées et ont pris le nom de « Ville de Jonquière ». Selon l’index du Grand Atlas routier du Québec (La Cartothèque Géo-Montages 1996), cette nouvelle ville compte 545 toponymes urbains – chemins, routes, ruelles, rues, boulevards et places. Pour ces noms de lieux, les responsables ont utilisé notamment des noms de saints chrétiens, de régions et de villes de France, de personnalités de l’histoire de la Nouvelle-France et du Québec ou de célébrités mondiales du domaine des sciences et des techniques ou des arts et des lettres. Parfois, l’origine d’un nom de lieu est obscure : par exemple, la rue Bourassa a-t-elle été nommée ainsi en l’honneur d’Henri Bourassa, de Robert Bourassa ou d’un conseiller municipal de ce nom ? Les archives locales ne contiennent aucun document qui résoudrait ce problème (Francœur 2014).

Par contraste avec la population entièrement francophone de Jonquière, il y avait dans la ville jumelle de Kénogami un quartier habité par les cadres anglais de la compagnie de pâtes et papier Price Brothers, fondée en 1912 (Noppen et Morisset 1994). Des rues étaient nommées en l’honneur d’Anglais, comme la rue Wolfe ou la rue King George. On avait aussi tout bonnement utilisé des noms d’arbres en anglais : Spruce, Birch, Maple, Oak. Quelque temps après la fusion de 1975, les noms d’arbres en anglais ont été remplacés par « Lapointe », « Bergeron », « Perron », « de l’Acadie ». Par contre, les responsables n’ont pas osé toucher à la rue Wolfe, nommée ainsi en hommage au vainqueur des Plaines d’Abraham. Quant à la rue King George, on l’a « francisée » : elle est devenue la rue du Roi-Georges (avec un « s »). Effet probable, et curieux, de la loi 101 sur la langue française adoptée en 1977 par l’Assemblée nationale du Québec.

Troisième ville fusionnée en 1975, Arvida a été créée en 1926 et doit son nom à Arthur Vining Davis, directeur général de la société américaine d’aluminium ALCOA et fondateur de la société d’aluminium ALCAN au Saguenay (Noppen et Morisset 1994). Plusieurs rues ont été nommées en hommage à des scientifiques liés de près ou de loin à la technologie de l’aluminium : Deville, Wohler, Berthier, Moissan, Davy, Volta, Oested, Castel. Peu de rues honorent des Anglais ou d’autres membres de l’Empire britannique : notons en particulier la rue McLeod, appelée ainsi en l’honneur de Peter McLeod, Écossais d’origine, rival puis associé malheureux de William Price dans l’exploitation des forêts locales au profit de la marine britannique, forte consommatrice de bois à cette époque. On dit aussi de Peter McLeod qu’il est « le fondateur de Chicoutimi », la ville voisine d’Arvida (Société historique du Saguenay 1938 : 173).

En 2002, la Ville de Jonquière, la Ville de la Baie et la Ville de Chicoutimi ont fusionné et pris le nom de « Ville de Saguenay ». Peu après cette fusion, en 2004, dans le secteur de l’ancienne ville de Chicoutimi, une lutte idéologique très révélatrice survient à propos d’un monument commémoratif : l’obélisque en hommage à William Price, dit le « père du Saguenay », et à trois membres de sa famille engagés dans l’entreprise familiale, la société Price Brothers, dont il a été question plus haut.

Les autorités municipales annoncent d’abord « dans l’indifférence populaire » (Tremblay 2004) que le monument Price sera déplacé et ira orner le centre d’un carrefour giratoire. Il s’écoule ensuite un certain temps avant que deux historiens locaux manifestent leur opposition et soient mis en vedette. Ces protestataires se fondent toutefois sur deux argumentations différentes. Le premier à intervenir refuse qu’on donne plus de visibilité à un exploiteur qui, au XIXe siècle, « avait établi dans la région un véritable monopole économique et social qui maintenait une grande partie de la population dans une profonde dépendance. » Un peu plus loin, dans le même texte, l’historien précise ses motivations : « On aura compris que mon opposition à ce projet n’est pas de nature ethnique. Il ne s’agit pas d’opposer bêtement Francophones et Anglophones » (Gérard Bouchard, 17 novembre 2004).

À ce premier historien qui fonde son opposition sur un argument de nature économique et sociale – la lutte des classes –, un second lui réplique en invoquant plutôt un argument de nature politique et militaire – la lutte des peuples : « L’aliénation dont vous secouez les chaînes est celle que les Canadiens français ont héritée de la conquête anglaise de 1760. » Cet historien termine par une mise en garde où l’on sent poindre la peur de la répression :

Faut-il vous rappeler, vous qui savez tant de l’histoire des révolutions, qu’il importe, dans ce genre de débat où il est facile de faire passer la passion au-dessus de la raison, à tous ceux et celles qui y prennent part, de faire en sorte que ce soit la seconde (la raison) qui l’emporte sur la première, et que le peuple, que vous appelez à votre rescousse en sollicitant justement ses passions, n’ait pas à en payer le prix un jour (Russel Bouchard, 20 novembre 2004).

Résultat final de la controverse : le monument Price restera là où il est.

Comme le suggère le récit sommaire qui précède, la lutte idéologique à la Ville de Saguenay peine à déboucher sur un changement dans la toponymie et les monuments commémoratifs. À notre avis, la raison en est certainement la peur – la peur du risque, la peur de la répression. Comment contrer cette impuissance des sujets individuels à transformer une situation qu’ils jugent inacceptable ? Comment éviter le ressentiment, cette colère rentrée, cet « autoempoisonnement psychologique » (Scheler 1933 [1919] : 14) ? Comment éviter de devenir, pour ainsi dire, des grabataires politiques ? Par une action collective disciplinée, réfléchie et opportune. Citons quelques éléments d’une campagne de commémoration libératrice, à la Ville de Saguenay ou ailleurs, selon ce que déterminera, souhaitons-le, un organisme spécial créé par les indépendantistes à l’échelle du Québec :

  • Préciser l’identité de chacun des personnages honorés dans la toponymie. Ajouter le prénom et un élément biographique sur les plaques. Si cela est impossible, abandonner le toponyme. Laisser dans l’obscurité les noms de saints, qui perdront graduellement leur sens et seront un jour abandonnés.
  • Repérer les hommages aux conquérants britanniques, à leurs successeurs canadiens et aux collaborationnistes québécois. Organiser un concours populaire visant à trouver de nouvelles personnalités à honorer. Procéder aux remplacements appropriés dans la toponymie.
  • Déménager dans un musée les monuments commémoratifs rejetés. Leur apposer une plaque pour indiquer les motifs de la réprobation publique. Mettre en place des monuments en hommage à des personnalités ou à des groupes dont le comportement doit servir d’exemple pour tous les citoyens.

Conclusion

Dans leur lutte de libération nationale, les indépendantistes québécois ont tout intérêt à tirer profit du puissant levier que représente une campagne de commémoration libératrice dans les villes du Québec. Une telle campagne serait l’occasion, pour la population entière, de mettre au jour la véritable histoire de la nation québécoise et de poser un premier geste de libération en abolissant les hommages paradoxaux des vaincus aux héros du Conquérant britannique, de l’État canadien, héritier du Conquérant, et du Québec collaborationniste. Le peuple québécois doit enfin prendre conscience 1) que le Québec est un territoire occupé et 2) qu’à quelques exceptions près, ses gouvernements successifs ont été des collaborateurs de l’ennemi.

Tout comme dans la France occupée par les Allemands entre 1940 et 1944, le collaborationnisme sévit au Québec. Cependant, à la différence de la France de cette époque, le Québec n’est plus soumis directement au Conquérant, mais à son héritier, la pseudoconfédération appelée Canada. Aux yeux des collaborationnistes québécois, qui se cachent sous le mot-écran de « fédéralistes », le Canada n’est pas l’héritier du Conquérant britannique, l’État successeur de l’Empire britannique en Amérique du Nord, mais une véritable fédération à laquelle le Québec aurait adhéré librement en 1867. En réalité, une poignée de collaborationnistes de haut vol ont voulu ou cru engager la nation québécoise tout entière à cette époque, alors qu’ils ne parlaient qu’en leur nom propre et au nom de leurs partisans. En effet, à la suite de la Conquête par les Britanniques en 1760, les descendants des Français et leurs alliés avaient été intégrés de force dans la colonie britannique du Canada-Uni en 1840. Ils ne constituaient d’aucune manière un sujet collectif politique indépendant et ne pouvaient donc entrer librement dans la pseudoconfédération canadienne.

Pour vaincre le collaborationnisme, qui s’exprime notamment dans la toponymie et les monuments publics, les actions individuelles ou en petits groupes désordonnés n’ont aucune chance d’aboutir. En effet, seule une action collective disciplinée, réfléchie et opportune menée à l’échelle du Québec par un organisme indépendantiste spécial aura des chances de réussite et permettra de passer aux phases ultérieures de la libération du Québec.


 

 

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1] Vers le milieu du siècle dernier, le psychologue américain Maslow a élaboré une théorie des besoins qui a inspiré la présente distinction entre les deux besoins fondamentaux d’un sujet individuel ou collectif. Voir Gaudreault 2007 dans la bibliographie.

2] « Le consentement doit être libre et éclairé. Il peut être vicié par l’erreur, la crainte ou la lésion » (Code civil du Québec, article 1399).

3] « The key factor was of course the publication of the truth about the Molotov-Ribbentrop Pact and the way the Balts came to be annexed in 1940. »

4] La situation de la France conquise par l’Allemagne en 1940 et assujettie jusqu’en 1944 est structurellement la même que celle de la Nouvelle-France liquidée militairement en 1760, devenue une colonie anglaise en 1763, unie de force à la colonie anglaise du Haut-Canada en 1840 et à toutes les autres colonies anglaises d’Amérique du Nord en 1867 sous le nom de « Dominion of Canada ». On pourra soutenir que les Britanniques et leurs héritiers canadiens ont été moins brutaux que les Allemands. Il est toutefois fort probable que cette opinion ne sera partagée ni par les descendants des Patriotes de 1837-1838, ni par les Acadiens de la diaspora, ni par les Amérindiens des réserves, ni par les Métis de l’Ouest qui se souviennent de Louis Riel.

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