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La fresque BMO à Québec: la dégradation du patrimoine

L’auteur est architecte et urbaniste, lauréat du prix Gérard-Morisset 2003 accordé à une personne pour l’ensemble d’une carrière consacrée au patrimoine dans le cadre des Prix du Québec.

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La fresque BMO du 400e a été peinte. Par ce geste, la Commission de la capitale nationale du Québec (CCNQ) a signé une insulte visible sur un joyau de l’architecture moderne des années 60. Elle s’affiche sur le mur ouest de l’édifice Marie-Guyart, rue de La Chevrotière et fait honteusement face à la chapelle des Soeurs du Bon-Pasteur, monument classé dont l’aire de protection devait contenir cette agression. Ce ne fut pas le cas. Pourquoi avilir une oeuvre-phare de l’architecture du mouvement moderniste international au Québec? Pourquoi mutiler un monument, symbole d’un État moderne, qui exprime avec grandeur et dignité, le « maîtres chez nous » de Jean Lesage. Une telle attaque à l’esthétique d’une architecture de grande valeur, propriété de l’État, est du jamais vu en Occident.

La fresque

Voilà un dessin néo-académique en trompe-l’oeil. Le malaise provient de la lecture de l’architecture aux murs simples, qui soudain se boursoufle en larmiers, en encorbellements, et s’enfle dans un fatras de fausses pierres taillées. La fresque annihile la portée de la composition architecturale en lui enlevant sa noblesse, sa pureté géométrique. Ce délire pour un décor en carton-pâte d’un théâtre désuet sera d’ici peu dissimulé par la croissance de quatre érables. Ce fantasme aura coûté 300 000 $.

Le laisser-aller

Abîmer une architecture réputée qui traduit avec talent la grande effervescence politique, artistique et sociale de la Révolution tranquille montre que c’est par indifférence, mollesse ou cécité que les commissaires ont entériné une telle injure à une architecture qui est distinction dans ses espaces et justesse dans ses volumes. Une esthétique pure. Elle devait être classée, mais. avec cette addition peinte, non compatible avec la création originale, elle ne pourra plus l’être. La fresque l’a défigurée.

La ministre de la Culture devait, au nom de l’identité nationale, empêcher cette opprobre sur ce monument d’excellence et être la première garante de la protection de cette oeuvre marquante. La froideur du gouvernement à l’endroit du patrimoine culturel laissera en héritage une mutilation effectuée par lui-même sur un patrimoine dont il est le propriétaire et le gardien. Décision coupable! Laisser-aller coupable!

Cette prise de position est appuyée par Madame Phyllis Lambert, architecte, directeur-fondateur du Centre canadien d’architecture.

Septembre 2008

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